- CRDP d'Alsace - Les dossiers -

Histoire, géographie
et politique de l'architecture : introduction

En guise d'introductionRevenir au début du texte

L’histoire de l’architecture en Alsace est comme partout étroitement liée à son histoire générale. Riche et mouvementée, ne serait-ce que par la position frontalière de notre province, cette histoire dépend tout d’abord de grandes politiques dont les exemples ne manquent pas : plan de circulation dans l’Empire romain, blanc manteau des églises chrétiennes, plans de défense nationaux de Vauban, de la ligne Maginot, actions prestigieuses des divers pouvoirs qui se sont succédés, etc.

Mais elle témoigne aussi, sinon plus, du quotidien des peuples qui ont vécu sur cette terre, quotidien des villages et des villes. L’enseigner donne donc forcément lieu à des choix. L’architecture a laissé et construit toujours de formidables témoignages de l’activité humaine, à la jonction de l’utile et du beau, du politique et du familier qu’ils soient religieux ou profanes.

Quels éléments choisir pour un enseignement de son histoire en Alsace ? Tout dépend des priorités que l’on se fixe et le retour à la définition même du mot peut donner des pistes simples.

Éléments de définitionRevenir au début du texte

Architecture : Art de construire les édifices – Disposition d’un édifice. Voici le sens premier que le dictionnaire Le Robert donne de ce mot qui évoque avant tout les grands bâtiments religieux, militaires et civils qui jalonnent l’histoire de l’humanité. Chaque mot de cette définition appelle un commentaire particulier. Il s’agit tout d’abord d’un art, une activité qui éveille l’imagination, la sensibilité, la fantaisie, la création … Il induit une construction, donc les capacités intelligentes et raisonnables d’une science et des techniques qui lui sont afférentes. Il se traduit enfin par un édifice dont l’architecture, la disposition finale, nécessite des qualités d’observation, d’analyse, d’esprit critique, mais aussi d’émerveillement et de curiosité.

Grande rosace - Cathédrale de Strasbourg

Grande rosace - Cathédrale de Strasbourg
Photo Pierre Kessler, 2010

Le terme édifice enfin désigne couramment un grand bâtiment, donc une construction qu’un seul homme ne peut faire, une construction liée à la Polis, à la cité d’autrefois, aux états, aux communautés. La construction domestique, familiale, semble être bannie du domaine de l’architecture par cette définition au sens strict. Mais les mots ne sont pas mesquins et leur usage s’élargit très fréquemment. L’architecture est aussi volontiers simplement synonyme de structure. Qu’importent la taille et l’étoffe du reste : des dalles taillées à même la roche de l’antique voie romaine qui traverse les Vosges aux lignes harmonieuses d’un paysage de vignes alsaciennes, tout peut être réflexion sur les aménagements que les hommes ont façonnés autour d’une idée ou d’une nécessité et avec les matériaux de leur choix. Quant à l’édifice, il se réduit souvent au terme de construction, perdant avec la taille la solennité mais non l’intérêt. Les petits édifices sont courants dans toutes les visites touristiques. Mais il est vrai qu’ils doivent posséder quelque chose en plus pour avoir le droit au terme d’édifice, quelque chose qui tient de l’art justement, on revient à ce premier mot, essentiel.

Car on pourrait être tenté de penser que tout est architecture. La banalité de la majorité des structures édifiées par l’homme fait cependant qu’on ne les regarde pas. Est-ce là le critère pour délimiter ce qui est digne d’être enseigné en tant qu’architecture de ce qui ne l’est pas ? Mais d’un observateur à l’autre, la sensibilité change. Quel paysan d’autrefois aurait pensé en construisant sa maison qu’elle serait un jour digne d’une étude d’histoire de l’architecture au même titre que le château du seigneur voisin ? Sommes-nous dans l’impasse ? Ou bien n’est-ce pas plutôt en se rappelant que ce sont les regards des hommes qui créent leurs objets d’études que l’on comprendra que l’enseignement de l’architecture varie en fonction des époques, des disciplines et des lieux. Certes, il flottera toujours autour du mot cette idée qu’il s’agit de parler de structures remarquables au sens littéral du terme. Soyons seulement ouverts face à ce remarquables, car le regard de l’autre peut nous aider à découvrir du remarquable en dehors de ce qui est traditionnel pour nous et nous amener ainsi vers des chemins de modernité.