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Le Haut-Koenigsbourg :
Repères historiques

Page mise à jour le 18/06/2012

Le Haut-Koenigsbourg <em>trônant</em> Vue générale vers 1820 Le château en 1900 Vue intérieure au XIXe siècle
Logis seigneurial et grande entrée depuis le sud-ouest Le château en 1600 Vue du côté sud au XIXe siècle Le château avant et après sa restauration par Ebhardt
Vue du château coté nord depuis l’entrée du Val-de-Villé Le château en 1633 Vue du château au XIXe siècle Grande salle voûtée du logis seigneurial

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Le château des Staufen (XIe - XIIe siècles) :

En 774 Charlemagne fait don au prieuré de Lièpvre (près de Sainte-Marie-aux Mines), une possession de l’abbaye de Saint-Denis, du Stophanberch ainsi que les terres environnantes de la vallée.

En 1079, l’empereur Henri IV, pour le remercier de son soutien lors de la querelle des Investitures, confère à Frédéric Ier de Staufen le titre de duc de Souabe et d’Alsace et la mission de contrer la puissance des Eguisheim, indéfectibles partisansdu pape. Pour défendre ses possessions, Frédéric fait édifier une série de châteaux. À sa mort, en 1105, son fils Frédéric Le Borgne implante durablement les Staufen en Alsace et se montre un redoutable adversaire des Eguisheim : il fait ériger, en 1114, en pleine illégalité, sur le sommet du Stophanberch, un premier château. Ce château est mentionné en 1147 sous le vocable de castrum Estufin dans une missive adressée par Eudes de Deuil, moine de Saint-Denis au roi de France Louis VII : il demande au souverain d’intervenir auprès de Conrad III de Hohenstaufen (frère du Borgne), afin de réparer ce tort fait à l’abbaye parisienne. La lettre reste sans effet.

Le château possède alors deux donjons, l’un appartenant au roi Conrad (1138-1152), le second à son neveu Frédéric Barberousse, le futur empereur (1152-1190). En 1192 apparaît pour la première fois le nom de Kinzburg dans les chartes, preuve que le nom du château a passé de Staufenberg à Koenigsberg. Or les Koenigsberg sont, vers 1150, une famille de chevaliers de la suite de l’empereur en son château d’Haguenau édifié par son père en 1115. Il est probable que l’empereur Frédéric leur ait confié le château et les ait chargés de la surveillance de l’importante voie de passage que dominele castel.

Le château au XIIIe siècle :

Pour le XIIIe siècle, les sources et chartes sont difficiles à interpréter. Au début du siècle, un second château est édifié à côté du premier : l’Oedenbourg ou Mittelkœnigsburg dont on ne connaît ni le constructeur ni le propriétaire. Ce qui est certain, c’est qu’en 1238 le château d’Estufin-Königsberg appartient au duc de Lorraine, à une époque où l’étoile des Hohenstaufen pâlit… Le duc inféode en 1250 le château au chevalier Cuno de Bergheim qu’il vient de soumettre, puis en 1254 au LandgraveHenri-Siegebert de Werd. Ce dernier le donne en 1262 en arrière-fief à son beau-père Ulrich de Ribeaupierre. La situation se révèle encore plus complexe en 1267 : les deux châteaux sont alors partagés entre trois familles cousines, toutes vassales du duc de Lorraine : les landgraves de Werd possèdent sans doute le château de Königsburg, alors que les Hohenstein partagent l’Oedenbourg avec les Rathsamhausen.

Le château aux XIVe et XVe siècles :

Le château reste aux Werd jusque vers 1350. Sans héritier, Jean de Werd transmet ses possessions à ses cousins d’Oettingen qui, en 1359, les cèdent contre 10 000 florins à Jean de Lichtenberg, évêque de Strasbourg. Le duc de Lorraine, lésé dans son droit de suzerain, proteste et inféode le château à Bourcard de Fénétrange. Déboutés devant un tribunal, les ducs maintiendront leurs prétentions jusqu’en 1474, date à laquelle l’évêque Frédéric de Blanckenheim accepte un échange de biens pour se maintenir au Koenigsbourg.D urant toute cette période, les Hohenstein et les Rathsamhausen restent arrière-vassaux du château. L’Oedenbourg tombe en ruines entre 1398 et 1417. En 1442, le château porte pour la première fois le nom de Haut-Königsburg ; la même année, l’empereur Frédéric III de Habsbourg est cité comme autre propriétaire, compliquant encore l’écheveau des suzerains, vassaux et arrière-vassaux…

Repaire de chevaliers brigands :

Durant la première moitié du XIVe, le pays est la proie à de nombreux conflits, invasions et guerres locales. En 1435, le château est pris et occupé par une bande de chevaliers brigands aux ordres de Jean de Westernach, ennemi juré du prince palatin Frédéric le Victorieux. Ce dernier fait assiéger le château en 1454 et négocie la propriété d’un quart du Haut-Koenigsbourg.

Pour faire bonne mesure, les Hohenstein ouvrent le château à de lointains cousins, les frères Henri et Reinhard Mey de Lambsheim, de véritables chevaliers-brigands qui font du château une base opérationnelle. En 1462, la bande pille un convoi de commerçants strasbourgeois se rendant à Bâle. C’en est trop : la métropole rameute les autorités ; une véritable armée est levée, qui compte des troupes de Bâle et de Strasbourg, de l'évêque de Strasbourg, de l'Autriche, des sires de Ribeaupierre : quelques cinq cents hommes viennent assiéger le château avec 17 canons. Leur tir débute le 26 octobre, mais ses effets sont plus psychologiques que matériels : dans la nuit du 29 octobre,la garnison s'éclipse sans demander son reste. Le château est incendié et détruit et le site donné à l’empereur.

Le château des Thierstein :

En 1479, Frédéric III de Habsbourg inféode la place aux frères Oswald et Guillaume de Thierstein, avec mission de reconstruire le château.

Commencés en 1480, les travaux de reconstruction sont achevés rapidement. Il en ressort un château totalement transformé, agrandi et adapté aux dernières techniques militaires : à l’avant du donjon une double ceinture de murs flanquée de tours est équipée pour le tir des armes à feu. Côté montagne est ajouté un bastion flanqué de tours ; les salles du château sont voûtées pour éviter les incendies. La forteresse est si puissante que l’archiduc Sigismond, neveu de Ferdinand III et régent du Sundgau, s’en inquiète et tente de faire cesser les travaux. Peine perdue : les Thierstein font installer un moulin, une forge, des écuries, renforcent le Tiergarten vers l’est et aménagent les lices autour du château. Ainsi, couronnant tout le sommet de la montagne, le Koenigsbourg devient le plus important château de la province.

En 1485, propriété impériale, le château devient, par décret de Frédéric III, un bien familial des Habsbourg, mais reste inféodé aux Thierstein : à Oswald succède son frère Guillaume puis ses fils Ostwald et Henri, seul héritier du fief en 1501. Mais, en 1517, Henri est ruiné et sans descendance. Il vend à l’empereur Maximilien Ier (1508-1519) le château et le village d'Orschwiller pour la somme de 12 000 florins, mais en conserve l’usufruit. À sa mort en 1519, l’empereur place des baillis au château.

Les Sickingen et les Bollwiller :

En 1533, à court d’argent, les Habsbourg engagent le château aux Sickingen qui leur avaient prêté 13 000 florins. Entre 1546 et 1552, François-Conrad de Sickingen engage des travaux de restauration (Toitures, voûtes, puits), qui lui coûtent 5 000 florins ; en 1563 l’empereur engage encore 6 000 florins pour maintenir le château en bon état et même, après les troubles religieux en France, renforcer son rôle militaire et donc sa garnison qui à cette date comptait une quinzaine de personnes. Mais François manque de moyens et ses relations avec la régence se tendent. Les Habsbourg convainquent donc le baron Rodolphe de Bollwiller, grand maréchal de l'archiduc Ferdinand, de rembourser l’engagère aux Sickingen et de reprendre la forteresse. Ce qui est fait en 1606. Rodolphe engage des travaux, mais la Régence ne fournit aucune aide : rapidement, Rodolphe est dépassé : le château continue de se dégrader. À sa mort, en 1616, son gendre Jean Ernest de Fugger investit des fonds propres, mais ne parvient pas à se faire rembourser par la Régence. Aussi baisse t-il les bras. Il nomme Philippe de Lichtenau, un simple écuyer, gouverneur du château.

La prise du château par les Suédois :

La guerre de Trente Ans ne touche vraiment l’Alsace qu’en 1632 avec l’intervention suédoise. Les Suédois s’emparent de l’Alsace et, en juillet 1633, toute la région leur appartient, hormis le château du Haut-Koenigsbourg, dans un état relativement délabré. Ils décident de s’en emparer et confient la tâche au Rhingrave Jean Philippe de Salm. Une première attaque menée par le colonel Von Harpfen à la tête de 500 hommes échoue face à l’artillerie du château qui reçoit peu après 40 soldats lorrains en renfort. La situation de Lichtenau devient quasi intenable lorsqu’une seconde tentative suédoise, bien mieux préparée, aux ordres de l’Oberwachtmeister Georges-Sébastien Fischer, qui investit le château et met son artillerie en batterie le 17 juillet sur les ruines de l’Oedenbourg. Malgré un sévère bombardement et les promesses jamais tenues de renforts de la Régence réfugiée à Brisach, et malgré la défection des gens d’Orschwiller réfugiés au château, Lichtenau résiste 52 jours et ne se rend que le 7 septembre 1633. Le château est pillé et incendié, puis rapidement abandonné par les troupes suédoises.

Le château sous la période française (1648-1870) :

Avec le traité de Munster-Westphalie, le château, désormais ruine, échoit au roi Louis XIV qui le reprend aux Fugger et le remet en fief aux descendants de François-Ferdinand de Sickingen. Ceux-ci le conservent jusqu’en 1770, date à laquelle ils le vendent au sieur Henry François de Boug, président du Conseil Souverain d'Alsace, qui s'intitule aussitôt de Boug d'Orschwiller. En 1825, les de Boug vendent la ruine et les vastes forêts qui en relèvent aux Dreyfuss de Ribeauvillé et aux Mannheimer d’Uffholz. Le domaine est racheté en 1851 par les frères Mannheimer de Colmar, puis en 1865 par la ville de Sélestat qui veut surtout les forêts. Entre temps, la Société pour la conservation des monuments historiques d'Alsace, nouvellement créée, multiplie les démarches pour éviter le vandalisme et le pillage de la ruine. Elle obtient son classement en 1862 et fait effectuer quelques travaux de consolidation. Puis l’architecte Winckler est chargé d’un projet de restauration. Mais les moyens financiers manquent et le projet échoue.

Commentaire des illustrations par Marie-Georges BRUN.