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Château du Haut-Barr : vue depuis l’entrée principale
Photo Marie-Georges Brun
La barre rocheuse de 458m d'altitude situé au sud-ouest de Saverne a toujours attiré l’intérêt des stratèges. Dans les premières années du XIe siècle, sans doute entre 1109 et 113, l’évêque Cunon de Strasbourg, fidèle des empereurs saliens et possesseur de Saverne, confie à un de ses ministériels, Merboto, la garde d’un château construit peu auparavant et appelé château de Borre. Ce château a une importance stratégique capitale puisqu’il interdit aux puissants comtes d’Eguisheim–Dabo toute attaque surprise qu’ils pourraient déclencher depuis leurs possessions lorraines ou depuis les terres de l’abbaye de Neuwiller dont ils sont les avoués et où ils ont construit le château de Warthenberg. En 1168, l’évêque Robert achète le rocher méridional du site et agrandit le château, transformé en véritable forteresse, renforçant ainsi son pouvoir temporel. Ses successeurs tentent de se constituer un puissant territoire et deviennent rapidement les personnages les plus puissants d’Alsace, se constituant un système castral très puissant aux dépens de l’empereur et des seigneurs locaux. Mais, en 1262, ils sont mis en échec par les milices de la ville de Strasbourg et choisissent Dachstein comme capitale épiscopale, qu’ils délaissent à la fin du XIVe siècle pour s’installer à Saverne. Le château devient alors une citadelle épiscopale, confié par l’évêque à de nombreux garnisaires nobles, chacun pour une période donnée, ce qui permet de les neutraliser et de mieux les contrôler (11 garnisaires en 1318 !). En même temps, le château devient lieu de pèlerinage dédié à la Sainte-Trinité. En 1413, l’évêque Guillaume de Diest, ruiné, engage le château et la ville au duc de Lorraine : il est alors retenu prisonnier par la ville de Strasbourg et doit renoncer à son projet !
En mai 1525, le château reste aux mains du bailli alors que la ville est prise par les paysans : la révolte écrasée, le château sert de prison et de nombreux paysans y sont exécutés.
L'évêque Jean de Manderscheid (1580-1592) entreprend d'importants travaux de restauration : les défenses sont renforcées (bastion ouest) et une résidence épiscopale y est aménagée dans le style Renaissance (portail d’entrée). Lors de la guerre des Évêques (1592-1604), le Haut-Barr devient la citadelle de base de Charles de Lorraine : il ne sera jamais inquiété, tant il est puissant. Mais lorsqu’éclate la guerre de Trente Ans (1618), il est dans un piteux état. Fin janvier 1634 le comte de Salm, battu à Marmoutier par le Rhingrave Otton au service des Suédois, vient s’y réfugier : il demande l’appui des troupes françaises qui occupent le château et la ville. Mais en novembre 1635, devant les troupes impériales, les Français se replient. Ils reviennent en juin 1636 et mettent le siège à la ville sans inquiéter le château. La ville leur ouvre ses portes après six semaines de siège. Les Français restent désormais maîtres de la situation. Après le traité de Munster, le château est démantelé (novembre 1649) par le commandant de Pesselières. La ruine est rendue aux évêques de Strasbourg, qui préfèrent construire leur palais dans la ville même.
Quand, en 1701, éclate la guerre de Succession d'Espagne, il est question de réarmer le château et Tarade est chargé du projet, qui est pourtant rapidement abandonné. Le projet est repris en 1743 et quelques travaux de consolidation sont entrepris, ce qui n’empêcha par la petite garnison d’abandonner le château à l’arrivée des Pandours en 1744. En 1772, le château est définitivement abandonné. En 1801, le maréchal Clarke, duc de Feltre, rachète la ruine et fait rouvrir la chapelle au culte. À la mort du maréchal, il est vendu à la famille Kolb et finalement acquis par l'État en 1878. En 1901 y est construit un restaurant de style alsacien. La ville de Saverne rachète la propriété en 1969 et y lance des travaux d'entretien et de fouilles archéologiques.