- CRDP d'Alsace - Banque Numérique du Patrimoine Alsacien -

La réforme grégorienne

Par Georges Brun

Publié le 21 décembre 2013

IntroductionRevenir au début du texte

L’église romaine a derrière elle plus d’un millénaire d'existence. A la fin du XIè siècle, elle connaît une de ses plus profondes mutations, de même importance que la Réforme luthérienne : c’est la réforme grégorienne, ainsi appelée à cause du rôle qu’y a joué le pape Grégoire VII (1073-1085).

Initiée par Léon IX d’Eguisheim (1049-1054), cette réforme dépasse largement l’œuvre de Grégoire VII. C’est entre 1054 et 1139 (deuxième concile du Latran) que les modifications sont les plus importantes, mais elles se prolongent jusqu’en 1215, (IVè concile du Latran, point d’orgue de la réforme). C’est donc un siècle et demi de bouleversements que vont vivre l’Eglise et la société féodale.

L'église en criseRevenir au début du texte

Avec le déclin du pouvoir carolingien et les invasions en Occident, l’Église et la chrétienté souffrent à divers degrés de maux et de désordres liés à l’insécurité et à l’absence de pouvoir central fort : cette crise se manifeste dans de nombreux domaines :

Les étapes de la réforme grégorienneRevenir au début du texte

En avril 1059, par décret, le pape Nicolas II proclame que seuls les cardinaux peuvent nommer le nouveau pape. L’empereur est donc éliminé des participants au choix du pontife. Le nouveau pape est acclamé ensuite par le clergé et par le peuple de Rome. En 1060, le concile du Latran condamne la simonie et le nicolaïsme.

Grégoire VII (1073-1085) poursuit par les décrets de 1074 la politique d’éradication de la simonie et du nicolaïsme dans le clergé. Il envoie des légats pour contrôler leur application et pour déposer les clercs immoraux. En 1075, Les « Dictatus papae » affirment l’autorité du pape sur les empereurs, rois et princes laïcs. Le pape dispose du pouvoir d’excommunication.

Mais les rois et les princes résistent à cette réforme. Le conflit sévit surtout entre le pape et l'empereur germanique: c'est la célèbre "Querelle des Investitures": en 1076, l’empereur Henri IV (1050-1084-1106) dépose Grégoire VII. En réponse, ce dernier excommunie le souverain. Devant les émeutes populaires, Henri IV demande finalement le pardon du pape lors de la pénitence de Canossa (janvier 1077). Mais la lutte ne s’arrête pas, car le pape renouvelle ses excommunications et l’empereur fait élire un antipape, Clément III. Grégoire VII meurt en 1085, mais la querelle des Investitures se poursuit encore une cinquantaine d’années sous les pontificats d’Urbain II, de Gélase II et de Calixte II.

Bilan de la réforme grégorienneRevenir au début du texte

Le bilan de la réforme grégorienne est inégal : simonie et nicolaïsme disparaissent presque totalement et la réforme contribue efficacement à une christianisation des consciences. Partout, la réforme monacale se réalise et avec les ordres nouveaux, une nouvelle spiritualité se développe dans la chrétienté. Les mouvements de la « Paix de Dieu » et de la « Trêve de Dieu » connaissent un véritable succès.

Sur le plan des relations avec les pouvoirs temporels, notamment avec les rois, des compromis sont atteints : En France, le processus de féodalisation des clercs s’arrête. Yves de Chartres distingue l’investiture temporelle (par le roi, pour les biens matériels) et spirituelle ou par la crosse (accordée par le peuple, le clergé et conférée par le métropolitain). En Angleterre le roi exige un serment de fidélité de la part des clercs.

Dans l’Empire, après de longues discussions entre le pape et l’empereur Henri V, le compromis du concordat de Worms est finalement accepté en 1122 : il marque la fin de la querelle des investitures. Mais dès 1152, débute la lutte du Sacerdoce et de l’Empire dont l’enjeu est la domination des empereurs germaniques sur la chrétienté occidentale.