Les hommes qui ont fait l'histoire

Né en Souabe et formé sur des chantiers influencés par l'art des Parler, Ulrich d'Ensingen commence sa carrière comme maître d'œuvre sur le chantier de la cathédrale d'Ulm et de la cathédrale de Milan. En 1399, il se rend à Strasbourg pour y négocier un poste et devient le nouveau maître d'œuvre de la cathédrale de la ville. Sur le chantier, il est donc reconnu comme un architecte expérimenté. Il dirige en même temps la construction de la cathédrale d'Ulm et de l'église d'Esslingen.

Son passage est marqué par une volonté de retour à la façade à deux tours. Seule la tour nord est exécutée et terminée en 1439 par son élève Johann Hültz. Il conçoit pour la base de la flèche un octogone cantonné de tourelles où se logent des escaliers à vis. Avec Ulrich d'Ensingen comme maître d'œuvre, un changement stylistique net dans la sculpture de la façade s'opère. Le goût du détail réaliste, la corporalité des figures accroupies à la base de la flèche se rapprochent des réalisations sculptées à cette époque à la cour de Bourgogne.

La légende, amplifiée par la tradition populaire à l'époque romantique, attribue à ce maître le plan de la façade de la cathédrale.

Erwin est présent sur le chantier de la cathédrale au moment de la pose de la première pierre du massif occidental, par l'évêque Conrad II de Lichtenberg, le 25 mai 1277. Il n'assure cependant la direction de l'œuvre qu'à partir de 1284, soit sept années après le début des travaux sur ce massif. Il invente le réseau rayonnant de la rose, proche de celui de Notre-Dame de Paris.

Erwin reste maître d'œuvre jusqu'à sa mort, en 1318. Son style se reconnaît dans le décor intérieur du narthex, du tombeau de l'évêque Conrad de Lichtenberg, et dans la chapelle de la Vierge, aujourd'hui disparue.

De part et d'autre du portail Sud, devant les contreforts, on remarque les statues en pied d'Erwin et de sa fille Sabine dues à Philippe Grass. Elles datent respectivement de 1866 et de 1842. Leur présence témoigne de la légende au XIXe siècle d’une femme dénommée Sabine, fille d’Erwin, qui aurait sculpté l’Église et la Synagogue.

L'arrivée de Michel de Fribourg, maître d'oeuvre issu de la grande dynastie des Parler, sur le chantier de la cathédrale de Strasbourg, va modifier la physionomie de la façade occidentale.

La façade se présentait comme un édifice à deux tours, proche de la conception des cathédrales françaises. C'est Michel de Fribourg qui, à la manière de l'architecture romane germanique et du principe des Westwerk, réoriente le chantier en comblant l'espace entre les deux tours.

Sous maître Gerlach, la rose est achevée et les travaux de la galerie des apôtres sont entamés. Les deux tours s'élèvent désormais jusqu'à hauteur de l'actuelle plateforme.

Gerlach réalise aussi la chapelle sainte Catherine. Dans cette chapelle, il réalise les voûtes étoilées à clefs pendantes, remplacées au XVIe siècle par les voûtes curvilignes actuelles, dont le style influence celles du monastère de Bebenhausen ou celle de la chapelle Barbazana à Pampelune.

À la mort d'Ulrich d'Ensingen, Jean Hutz de Cologne prend la succession du chantier et engage l'exécution de la flèche. Celle-ci est conçue comme une pyramide à huit pans, hérissée de petits édicules ajourés et couronnée d'un lanternon. Outre la prouesse technique qu'elle constitue, la flèche offre une impression générale d'un élan vertical vertigineux.

Claus de Lore termine le chantier commencé par Michel de Fribourg et relie les deux tours de la façade par le beffroi.

En 1491, le sculpteur Conrad Sifer de Sinsheim est reçu bourgeois en sa qualité de maître d'oeuvre de la cathédrale. Avant de venir à Strasbourg, il a édifié, dans l'église Saint-Georges de Sélestat, des ouvrages remarquables, tels un Saint-Sépulcre et un jubé.