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Biographie des principaux acteurs du conflit

Sous la direction de Georges Brun

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Lanrezac Charles Louis Marie

Général français vainqueur de la bataille de Guise mais limogé par Joffre.

Charles Lanrezac : sa désobéissance sauva la France, et lui valut un limogeage... - G. Brun d'après un portrait de l'époque.

Charles, Louis, Marie Lanrezac (1852-1925) est issu d’une famille de la petite noblesse toulousaine. Son père, Auguste Lanrezac, est officier d'infanterie de marine. Il reçoit du préfet de la Manche, une bourse pour étudier au Prytanée militaire de la Flèche alors que son père est en garnison à Cherbourg. Renvoyé de La Flèche, il entre à Saint-Cyr en 1869 dont il sort sous-officier et prend part aux combats de la guerre de 1870 dans l’Armée de la Loire. En janvier 1871, il se bat autour de Belfort pour dégager la ville et prendre les Prussiens à revers en Alsace, pour battre en retraite sur Besançon et échapper à l’internement en Suisse. Puis il reprend ses études à Saint-Cyr et est affecté au 30ème régiment d'infanterie à Annecy en qualité de lieutenant.

Il grimpe ensuite dans la hiérarchie militaire et se voit nommer général de brigade en juin 1906. Professeur, puis commandant en second de l'École de Guerre, Charles Lanrezac est l'un des plus fins stratèges français, mais hélas le moins écouté, à la veille du premier conflit mondial, car il s’oppose à l’offensive à outrance, trop couteuse en hommes, au profit de manœuvres raisonnées.

En avril 1914, Joffre le place à la tête de la 5e Armée française et le fait entrer au Conseil Supérieur de la Guerre. Il convainc le général le danger de voir les armées allemandes déboucher au nord de la Meuse et de la Sambre et positionne ses troupes sur le front de Charleroi. Lors de la bataille de Charleroi, il se rend compte de l’impréparation de son armée et ordonne le 23 août une retraite ordonnée par devers Joffre. Cette décision sauve son armée et permettra la victoire de la Marne.

Le 29, après avoir regroupé ses hommes, il porte un coup d'arrêt sérieux à l’armée de Von Bülow lors de la bataille de Guise et l’oblige à resserrer son dispositif vers l'est. Il contribue ainsi indirectement à la victoire de la Marne, quelques jours plus tard.

Mais le 3 septembre 1914 il est limogé par Joffre et remplacé par Franchet d'Espèrey : on lui reproche son esprit critique et sa mésentente avec le général anglais French. Renvoyé à Gallieni, il est affecté à Bordeaux à la formation d'une armée de réserve. Désabusé, il refuse en 1917 le poste de major général des armées que lui propose Paul Painlevé, alors ministre de la Guerre. En 1920, il publie un ouvrage où il critique, preuves à l'appui, Joffre et son entourage. Il ne sera réhabilité qu’en 1924.

Charles Lanrezac décède le 18 janvier 1925. Il repose aux Invalides.

Lardemelle Charles de

Général français d'origine lorraine, chef d'état-major de la Vè armée.

Charles de Lardemelle (1867-1935), né à Metz, est issu d’une famille de militaires de carrière, qui en 1871 optent pour la nationalité française. Après des études à Nancy, il entre à Saint-Cyr. Affecté comme sous-lieutenant à Verdun en 1887, il prépare l’École de Guerre. Capitaine en 1896, il devient l’officier d’ordonnance du général Hervé, commandant le 6ème corps d'armée.

En 1900, Lardemelle est affecté en Indochine puis en de Chine où il participe à la prise de Pékin lors de la guerre des Boxers. De retour en France, il est nommé en 1913 chef d’état-major du 1er Corps d'Armée à Lille.

Pendant la Première Guerre mondiale, Lardemelle participe aux grandes batailles de 1914, puis prend les fonctions de chef d’état-major de la Ve Armée.

En 1915 il est envoyé dans les Balkans où il prend le commandement de la 122ème division d'infanterie. Le 20 novembre 1915, face à l’offensive bulgare en Macédoine, il fait retraite de la boucle de la Cerna et est remplacé par le général Gérôme. Rentré en France en 1916, il prend le commandement de la 74e division. Il participe ensuite à diverses opérations en Champagne et dans la Meuse, jusqu'à la victoire.

En 1922, il devient gouverneur de Metz, poste qu’il conserve jusqu’en 1929. Il meurt à Paris le 28 décembre 1935.

Lawrence Thomas Edward

Archéologue et aventurier anglais, grand défenseur le da cause arabe et partisan de la lutte contre les Turcs.

Thomas Edward Lawrence dit Lawrence d'Arabie (1888-1935). Fils d’un baronnet de petite noblesse qui avait quitté sa femme pour la gouvernante de leurs filles, Thomas fait ses études au Jesus College à Oxford et se passionne pour l’histoire. Entre 1907 et 1910 il voyage en France, au Liban et se Syrie où il étudie les châteaux médiévaux. De retour, il publie une thèse sur les châteaux.

Il repart fin 1910 au Liban et en Syrie pour occuper un poste d’archéologue et fait des fouilles à Byblos et Karkemish, revenant de temps en temps à Londres. En janvier 1914, sous couvert d’archéologie, il est envoyé au Sinaï en mission de renseignement par l’armée britannique.

Sa rencontre avec les nationalistes arabes lui fait concevoir le projet de création d’un empire arabe sous influence britannique, aux dépens des Turcs. Membre du service cartographique du Caire (1914), puis du bureau arabe (1916), ayant adopté le mode de vie des Bédouins, il appuie avec succès Allenby dans la conquête de la Palestine (1917-1918).

Après l'expulsion de l'émir Faysal de Syrie par les Français (1920), il démissionne (1922), et s'engage dans la Royal Air Force. Il accomplit des missions en Inde (1923-1928) et quitte l’armée en 1935. Il se tue en moto le 19 mai 1935.

Le personnage reste cependant sujet à caution, s’attribuant très souvent des mérites qu’il ne possédait pas… Ainsi il n’est pas le seul à avoir soulevé les Arabes contres les Turcs : le lieutenant-colonel Brémond, chef de la mission française au Hedjaz, a sans doute fait un travail équivalent, et se montre d’ailleurs très critique vis-à-vis de Lawrence : personnage surfait, indiscipliné, méprisant les Arabes, foncièrement francophone.

Leber Julius

Homme politique alsacien resté allemand après la guerre, opposant irréductible au régime nazi.

Julius Leber (1891-1945) est l’une des figures les plus marquantes du mouvement allemand de résistance au national-socialisme. Leber est originaire de Biesheim près de Colmar où il naît en 1891 et d’extraction modeste. Il suit un apprentissage dans une usine de textile ; mais une volonté de fer l’amène à fréquenter un collège puis l’université. Pendant la Première Guerre mondiale, il est officier sur le front et à ce titre décoré à plusieurs reprises.

En 1920, il obtient le grade de docteur en sciences politiques. Il assure ensuite avec succès la direction de la rédaction du « Courrier populaire de Lübeck ». De 1924 à 1933, il est membre du Reichstag en tant que chef des sociaux-démocrates de Lübeck. Opposant irréductible au régime hitlérien, il est arrêté dès le début de l’année 1933 et maintenu en prison jusqu’en 1937, dans des conditions extrêmement pénibles : il demeure une année entière dans un cachot obscur.

Après sa libération de prison, il continue avec une force égale son combat conséquent contre le totalitarisme et pour une démocratie vivante. Camouflé comme charbonnier à Berlin-Schöneberg, il déploie une énergie passionnée en vue de renverser le régime nazi. Dans ce but, il entre en relation avec d’autres résistants et il fait appel à des amis, notamment Ernst Von Harnack, l’ancien chef du gouvernement social-démocrate de Mersebourg, et Ludwig Schwamb, ancien conseiller d’Etat au ministère de l’Intérieur de Hesse, l’un et l’autre nouant des liens avec d’autres groupes oppositionnels et appartenant aux victimes de l’attentat du 20 juillet 1944 contre Hitler. Dans le camp socialiste, c’est surtout lui qui imprègne l’action de l’été 1944. Dès le 5 juillet 1944, il est à nouveau interpellé par la Gestapo. Son attitude devant le prétendu « tribunal populaire » impressionne même le sinistre Freisler. Leber est condamné à mort et exécuté le 5 janvier 1945.

Lebrun Albert François

Homme politique français, dernier président de la IIIè république.

Albert, François Lebrun (1871-1950) naît à Mercy-le-Haut en Meurthe-et-Moselle. Fils d'un agriculteur maire de son village, il part faire ses études au lycée de Nancy. Brillant élève, il entre à l'École polytechnique (Promotion X 1890), dont il sort major, puis corps des Mines dont il sort également major en 1896.

Ingénieur des mines à Vesoul, puis à Nancy, il épouse en 1902 Marguerite Nivoit, dont il a deux enfants. Il se lance en politique sous l’étiquette de l'Alliance républicaine démocratique (modéré du centre puis de droite, ouvert aux revendications sociales mais inquiet des menées révolutionnaires.) : conseiller général d'Audun-le-Roman en 1898, en, président du Conseil général de Meurthe-et-Moselle (1906-1932), député de la circonscription est Briey (1900-1920), sénateur (1920-1932). Sous la présidence d'Armand Fallières, il devient ministre des Colonies (27 juin 1911-12 janvier 1913) puis brièvement ministre de la Guerre (janvier 1913). Il devient ministre des Colonies sous la présidence de Raymond Poincaré (1913-1914). En 1914, il est mobilisé et part au front à Verdun comme commandant d'artillerie. A la fin de la Première Guerre mondiale, il est ministre du Blocus et des Régions libérées (23 novembre 1917-24 décembre 1918). Après l'armistice, il demeure ministre des Régions libérées (24 décembre 1918-6 novembre 1919).

En 1926, il devient vice-président du Sénat, puis président en 1932. Le 10 mai 1932, Albert Lebrun est élu président de la République à la suite de l'assassinat de Paul Doumer. Son septennat est marqué par une forte instabilité ministérielle (17 présidents du conseil entre 1932 et 1940), mais il intervient peu dans la conduite des affaires gouvernementales, hormis le 9 février 1934, lorsqu’il rappelle à la tête du gouvernement Gaston Doumergue après les émeutes du 6 février. Après un premier septennat, il est réélu en mai 1932.

Le 16 juin 1940, après la démission de Paul Reynaud, hostile à l'armistice, il appelle Philippe Pétain à la présidence du conseil, puis se replie avec le gouvernement à Tours, Bordeaux et enfin Vichy. Le 10 juillet, Pétain est investi des pleins pouvoirs par le Parlement ; Lebrun, sans démissionner, se retire à Vizille. Arrêté le 27 aout 1943 par les Allemands, il est déporté dans le Tyrol et relâché en octobre pour raison de santé.

A la libération, n'ayant pas démissionné, il pense retrouver ses fonctions, mais De Gaulle met en place le Gouvernement provisoire dans lequel il n’a aucune place. Le 25 avril 1945 Il témoigne au procès de Pétain.

Le président Lebrun s’éteint à Paris le 6 mars 1950.

Lénine Vladimir Illich

Révolutionnaire russe, créateur de l'Etat soviétique après la révolution d'Octobre 1917.

Lénine : de l'Internationale à la dictature. - G. Brun, d'après un portrait des années 1920.

Enfance et formation

Lénine (Vladimir Ilitch Oulianov) naît à Simbirsk (Oulianovsk sur la Volga) dans une famille aisée. Il fait ses études au lycée de Simbirsk. Un de ses professeurs est Féodor Kerenski, le père de son futur adversaire politique. En 1886 il perd son père et en 1887, année de la fin de ses études, son frère Alexandre est arrêté par la police pour avoir fomenté un attentat contre le tsar et pendu. La famille Oulianov est désormais ostracisée et Volodia, fortement ébranlé par la mort de son frère, décide de s’engager dans les mouvements révolutionnaires.

Entre 1887 et 1891 il poursuit des études de droit à l’université Kazan de Samarra, découvre l’œuvre de Marx et de Nikolaï Tchernychevski, et exerce le métier d’avocat dans cette même ville de 1891 à 1893. Considéré comme subversif, il fait déjà l’objet de la surveillance policière. Il part en 1893 pour Saint-Pétersbourg où il adhère, à côté de son travail d’avocat, au mouvement socialiste révolutionnaire et noue de nombreux contacts avec les socio-démocrates. La théorie de la prise du pouvoir par une petite élite de militants utilisant la terreur le séduit particulièrement. A l’automne il rencontre une militante marxiste, Nadejda Kroupskaïa (1869-1939) qui devient da compagne.

En mars 1895 il effectue un premier voyage en Suisse où il rencontre Pavel Axelrod et Gueorgui Plekhanov, les fondateurs du premier parti marxiste russe. De retour, il fonde avec Julius Martov (1873-1923), le futur leader des Mencheviks, un groupe politique baptisé « Union de lutte pour la libération de la classe ouvrière », qui prône l’action directe sur le terrain au service de la lutte ouvrière, et dont il est chargé de la propagande.


Le premier exil

Le 9 décembre 1895, il est arrêté par l’Okhrana, la redoutable police politique du tsar, avec d’autres membres du groupe. Il est condamné à deux ans de prison et à trois ans d’exil politique en Sibérie. Il y est rejoint par Kroupskaïa. Il publie de nombreux articles dans la presse et écrit des ouvrages comme « Etudes économiques », « Le Développement du capitalisme en Russie », qu’il signe Vladimir Iline. Il y développe la thèse que la Russie est prête à la Révolution et au renversement du régime tsariste.

Son exil achevé, mais persona non grata à Saint-Pétersbourg, il prend en juillet le chemin de la Suisse. Il y retrouve ses amis et ils décident ensemble de crée un journal, « Iskra » (L’étincelle). Apparaît la première divergence avec Plekhanov qui veut contrôler le journal. Après de difficiles négociations, Lénine s’installe à Munich. Le premier numéro parait en décembre, et 12 suivront en 1901. Kroupskaïa et sa mère le rejoignent dans la ville bavaroise, puis plus tard un certain Léon Bronstein, dit Trotski. La même année, il publie la brochure « Que faire ? », œuvre fondamentale où il expose sa théorie révolutionnaire et l’organisation de la révolution, confiée à un parti élitisme qui mènerait les masses (incultes) à la dictature du prolétariat… Parallèlement il se consacre à la rédaction d'un programme pour le Parti ouvrier social-démocrate de Russie, en vue de l'organisation de son second congrès. Entre temps, comme la surveillance policière se fait plus étroite, Lénine déménage son journal à Londres en avril 1902.


En août 1903, lors du second congrès du Parti ouvrier social-démocrate de Russie à Londres, le parti se scinde : de la scission naît le parti Menchévik (« minoritaire »), dirigé par Martov, qui prône la révolution par étapes et le multipartisme, et le parti Bolchevik (« majoritaire ») de Lénine, théoricien de la révolution violente et d’un parti unique et élitiste. Mais ses positions excessives isolent Lénine : abandonné par Plekhanov, par Trotski, il est critiqué aussi par les prestigieux socialistes allemands comme Rosa Luxembourg ou Karl Kautsky, et les Mencheviks contrôlent l’Iskra. Découragé un temps, il passe l’année 1904 à préparer le 3ème congrès, bien décidé cette fois-ci à l’emporter. Il rallie de nouveaux sympathisants (Kamenev, Rykov), créé un nouveau journal qu’il contrôle totalement, « V Period » et s’assure d’une majorité de partisans pour le nouveau congrès.

Le IIIè congrès qui s’ouvre au printemps 1905 lui assure la majorité, et les Mencheviks fon scission et partent pour Genève.


La révolution de 1905

La révolution de 1905 surprend Lénine, d’autant qu’elle est noyautée par les Mencheviks, les Bolcheviks étant totalement absents. Lénine attend cependant le mois de novembre et la politique d’ouverture de Nicolas II (Manifeste d’octobre) pour rentrer en Russie. Tout en prônant la révolution par la terreur, il encourage le Parti à présenter des candidats aux élections et se rapproche, sans doute par tactique, des Mencheviks, ce que les militants réprouvent. Le mouvement révolutionnaire s’essouffle et début 1906, Lénine quitte Saint-Pétersbourg pour la Finlande où il rencontre pour la première fois un militant géorgien, aux méthodes aussi brutales que les siennes, Joseph Vissarionovitch, alias « Koba », le futur Staline. Il élabore à cette époque le concept de centralisme démocratique, qu'il définit alors comme l'alliance de la « liberté de discussion » et de l'« unité d'action »… Aux yeux de Lénine, la violence est le moteur de l'histoire et de la lutte des classes : il faut par conséquent l'encourager pour détruire le « vieux monde » et, surtout, l'organiser et la subordonner aux intérêts du mouvement ouvrier et de la lutte révolutionnaire. Mais lors du congrès de Stockholm en avril 1906, la tendance bolchévique reste minoritaire.


Le second exil

En novembre 1907, craignant que la police du tsar ne vienne l’arrêter jusqu’en Finlande, il repart en exil et s’installe en Suisse puis à Paris (1908-1913) où il rencontre Inès Armand qui deviendra sa maîtresse, Cracovie puis à nouveau la Suisse. Il vit dans une relative aisance, entouré de ses proches. Au sein du parti, les effectifs fondent, l’argent manque : le parti est financé en par des dons (Maxime Gorki) ou par des hold-up, devenus la spécialité de Krassine ou de Koba. Surtout, le parti reste déchiré par des luttes internes entre Lénine, qui reste partisan de l’élitisme, Trotski, qui veut s’appuyer sur les soviets formés d’ouvriers et de paysans, et surtout Bogdanov, qui demeure partisan du boycott de la Douma et veut se rapprocher des socialistes et concilier religion et révolution. En 1908, grâce à un important héritage (Fonds Nicolas Schmidt) destiné à tout le parti mais détourné par Lénine au profit des seuls bolcheviks, il créé le journal « Proletari » dont il est le rédacteur avec Zinoviev et Kamenev après en avoir exclu Bogdanov.


En 1910 se tient à Paris la cinquième conférence du parti : derrière un apparente unité, jamais il n’a été si divisé entre les diverses tendances : celle de Lénine, accusé par les autres d’être le fossoyeur du parti, celle de Trotski qui à désormais son propre journal à Vienne, la « Pravda », celle enfin de Bogdanov qui dirige « V Period ». Lénine est au bord de la dépression… Au printemps 1911 cependant, il créé à Longjumeau une école du parti.


Entre temps, l’agitation reprend fortement en Russie, où les grèves sont de plus en plus nombreuses. Lénine décide alors de frapper un grand coup en préparant le congrès de Prague en janvier 1912 : avec l’aide de Grigory Ordjonikidze (1886-1937), représentant des bolcheviks de Russie, il fait en sorte que les bolcheviks soient les plus nombreux, n’en invitant que deux sur les 18 délégués. Malgré les protestations de Trotski qui organise à Vienne une réunion concurrente, Lénine fait élire un comité central composé de bolcheviks, dont Ordjonikidze, Zinoviev, Iakov Sverdlov et Roman Malinovski (1876-1818) et seulement d’un menchévik. Ce comité central sera désormais le seul représentatif du parti. En avril 1912, le Parti se dote d’un organe officiel, le quotidien « Pravda » (La vérité) qui paraît en Russie, dépossédant ainsi le journal de Trotski de son titre. La même année, Staline entre au comité central.

Aux élections à la quatrième douma (automne 1912), les bolcheviks obtiennent plus d'un million de voix ouvrières (contre 200 000 aux mencheviks) et sont représentés par 6 députés, dont Malinowski (en fait un agent double de l’Okhrana). En dépit des efforts de l'Internationale socialiste, la scission entre bolcheviks et mencheviks est totale.


La guerre

Lorsque la guerre éclate, Lénine se trouve en Slovaquie où sa femme se soigne, et prépare le futur congrès du parti. Il obtient un passeport pour la Suisse alors qu’à Saint-Pétersbourg les députés bolcheviks sont arrêtés et que le parti est décapité.

Pour Lénine, « La guerre est le plus beau cadeau fait à la révolution ». Alors que les partis sociaux-démocrates traditionnels se solidarisent avec leurs gouvernements respectifs et soutiennent la guerre, Lénine souhaite la défaite de la monarchie tsariste et voit dans la guerre la chance de la révolution. Il réunit donc en septembre 1915 la conférence de Zimmerwald à laquelle participent Karl Radek, Trotski, Ledebour et des délégués scandinaves. Mais il reste minoritaire, sa thèse de transformer la guerre en guerres civiles révolutionnaires dans chaque pays est rejetée. Il signe cependant le manifeste qui appelle les ouvriers du monde à lutter pour une paix sans annexions ni indemnités de guerre.


La première révolution et le retour

En 1916, le tsarisme est discrédité. Le rôle de Raspoutine auprès du tsar, le désastre militaire, la crise économique de l'hiver 1916-1917 sonnent le glas du régime. En mars 1917, Petrograd se révolte et partout se forment des soviets, dominés par les menchéviks et les sociaux-révolutionnaires, qui soutiennent un Gouvernement provisoire constitué par les bourgeois libéraux sous la direction du prince Lvov et du socialiste Aleksandr Kerenski. Le gouvernement libère les détenus politiques, promulgue une amnistie et la liberté des nationalités et des syndicats. Mais il maintient les alliances du tsarisme à l'étranger et continue la guerre. Dans un premier temps, la libération des dirigeants bolcheviks entraîne le ralliement de la majorité bolchevik à un soutien critique au Gouvernement provisoire, représentant la nécessaire étape bourgeoise de la Révolution. Lénine n’est pas d’accord et décide de rentrer en Russie. Grâce à Platten, un ami socialiste suisse, il obtient des Allemands de traverser le Reich dans un train « extra territorialisé » : les Allemands sont en effet convaincus que Lénine, une fois la Révolution accomplie, ferait la paix. Ils s’engagent même à soutenir financièrement Lénine.


Le 27 mars, Lénine quitte Zurich avec une trentaine d’autres bolcheviks (Zinoviev, Radek, Inessa Armand…) Dans le train, il rédige ses fameuses « Thèses d’Avril ». Il arrive à Petrograd le 16 avril 1917 et développe immédiatement ses thèses : le Gouvernement provisoire est un gouvernement impérialiste et bourgeois, et il est impossible de terminer la guerre sans renverser le capital. Il faut que les soviets, dominés par les bolcheviks, soient le lieu d'où sortira le nouveau pouvoir qui appliquera les mesures bolcheviks : nationalisation de la terre, fusion des banques en une grande banque nationale, contrôle des soviets sur la production et la distribution. Enfin, il propose l'abandon du terme social-démocrate et l'adoption de celui de communiste. Ce programme, il le résume dans une phrase simple : « le pain, la terre et la paix ».

Mais de nombreux cadres du Parti sont choqués par la violence de ses thèses, à commencer par Zinoviev, Kamenev, Bogdanov, Martov. Mais peu à peu, il parvient à convaincre ses adversaires qui se rallient bientôt au mot d’ordre « Tout le pouvoir aux soviets ». En mai, il reçoit le ralliement de Trotski, partisan de la « révolution permanente », qui entre au parti en juillet.


La révolution d’Octobre

Le 15 juillet, la grande offensive Kerenski en Galicie se transforme en désastre militaire. Le 17 le peuple et la garnison de Petrograd se soulèvent, mais le gouvernement écrase le mouvement et arrête les leaders bolcheviks ; Lénine passe à la clandestinité avant de fuit en Finlande en août où il réunit le 17 dont le comité central comprend Lénine, Trotski, Zinoviev, Kamenev, Boukharine.

Début septembre, le général Kornilov tente un coup d’état visant écarter le gouvernement Kerenski et à instaurer un régime de droite. Kerenski est obliger de faire appel à la collaboration des bolcheviks pour faire échouer Kornilov, ce qui fragilise énormément le nouveau régime. Lénine juge le moment favorable, et le 25 septembre met à l'ordre du jour la question de la prise du pouvoir par les bolcheviks. Mais là encore, la plupart des dirigeants bolcheviks s'opposent à lui, voulant participer au « Pré parlement » proposé par Kerenski et devant mettre en place une constitution. Lénine, soutenu par Staline et Trotski, met en balance sa démission pour obtenir le boycottage et la décision d'insurrection.

De retour à Petrograd, Lénine participe à la séance secrète du Comité central du 23 octobre, qui fixe le jour de l'insurrection au 7 novembre (ou 25 octobre du calendrier russe). Il rédige l'Appel aux citoyens de Russie, publié le 7 par le soviet de Petrograd. Le 8, vers 2 heures du matin, le palais d'Hiver (siège du gouvernement) capitule. Le soir, Lénine déclare à la tribune du IIe Congrès panrusse des soviets, où les bolcheviks sont désormais majoritaires : « Maintenant nous abordons l'édification de l'ordre socialiste. » Il rédige les décrets sur la terre (« la possession de la terre par les propriétaires fonciers est abolie immédiatement et sans contrepartie […] le droit de propriété privée sur la terre est supprimé à jamais ») ; il annonce la paix.


La paix et le communisme de Guerre

Dès décembre 1917 les négociations de paix débutent à Brest-Litovsk. L'armistice est signé le 15 décembre ; Mais comme les négociations traînent, l'Allemagne reprend l'offensive en février 1918. Malgré l'opposition de Boukharine et d'une partie du Comité central, Lénine exige la paix, alors que les conditions allemandes sont extrêmement dures : la Russie perd le quart de son territoire. Le traité de Brest-Litovsk est signé le 3 mars 1918. La discussion sur la paix a durement ébranlé le parti.

En mars 1918, le parti ouvrier social-démocrate de Russie devient parti communiste (bolchevik), et en juillet le Ve Congrès des soviets ratifie la première Constitution soviétique. Le régime prend la tournure d’une dictature, et les groupes d’opposition, particulièrement les mencheviks, sont systématiquement poursuivis. Fin 1917 la guerre civile s'étend, et les anciens alliés du tsar interviennent dès 1918. Cette guerre civile radicalise Lénine qui créé la Tcheka en octobre 1917, dont il confie la direction à Felix Dzerjinski et qui inaugure la répression (création des premiers camps), alors que l’Armée Rouge est créée par Trotski. L’attentat qui le vise et le blesse le 30 août 1918 radicalise encore ses positions.

Le VIIIe Congrès du parti, réuni en mars 1919, décide du « communisme de guerre » : entraîne la mobilisation et le contrôle de toutes les ressources du pays sont mobilisées, le commerce privé disparaît, les opposants poursuivis, emprisonnés, déportés ou assassinés… La même année, Lénine fonde la IIIème internationale (Komintern) pour exporter la révolution dans le monde entier.


La NEP et les dernières années

Mais si la guerre civile prend fin en 1921 par la victoire des Rouges, l'échec des mouvements révolutionnaires en Europe, particulièrement en Allemagne (mars 1921) amène Lénine à se consacrer à la construction du socialisme en Russie. La situation est en effet désastreuse en Russie, le communisme de guerre a ruiné le pays. Partout les paysans se révoltent contre les réquisitions et les ouvriers de Petrograd se mettent en grève ; le 8 mars 1921 les marins de Kronstadt se révoltent contre le régime. Lénine ordonne une répression sanglante menée par Trotski (7-18 mars) et en même temps opère une grande purge au sein du parti, mais se rend compte de la nécessité sur le plan économique d'un « repli stratégique » : il met en place la NEP ou « Nouvelle Politique Economique » : fin des mesures de réquisition, rétablissement de la liberté du commerce, retour à l'économie monétarisée, tolérance d'une industrie privée de petite taille… En même temps, il renforce son pouvoir au sein du parti : Le Bureau politique détient désormais la puissance qui revient en droit au Comité central et au Xè congrès, le secrétariat du Bureau politique voit encore s’accroitre ses pouvoirs.


En avril 1922, suite au XIè congrès, Staline devient secrétaire général du Bureau politique du Comité central. Le 26 mai suivant, après des premiers symptômes d’artériosclérose, Lénine est frappé d'une attaque. Il ne peut reprendre ses activités que partiellement. Mais il se rend compte du danger principal qui menace un parti déjà entièrement bureaucratisé : le conflit entre Staline et Trotski. En décembre, il prend ses distances avec Staline qu’il juge brutal et dangereux et demande au comité de « réfléchir aux moyens de remplacer Staline à son poste ». Le 6 mars, il envoie à Staline une lettre de rupture, mais le 9, une nouvelle attaque le foudroie et le prive de la parole. Malgré une courte rémission en été 1923, Lénine meurt le 21 janvier 1924 après avoir fêté Noël avec les enfants du village dans le manoir de Gorki. Le célèbre testament, lu au cours du XIIIe Congrès du parti (23-31 mai 1924), n'est pas rendu public : Staline a déjà la mainmise sur le parti.

Le totalitarisme d’Etat et ses enfants, la terreur et le goulag, créations de Lénine sont désormais en marche…

Lettow-Vorbeck Paul Emil Von

Commandant des forces allemandes de l'Afrique Orientale allemande.

Lettow-Vorbeck : le seul qui mettra les alliés en échec en Afrique. - G. Brun, d'après un portrait des années 1920.

Paul Emil Von Lettow-Vorbeck (1870-1964) naît dans une famille militaire à Sarrelouis. il se forme à l’Ecole des Cadets de Potsdam, puis à celle des Gross-Lichtervelde dont il sort lieutenant d’artillerie (1888). Envoyé en Chine lors de la guerre des Boxers (1900-1901), il est ensuite engagé dans le Sud-Ouest africain allemand (1904-1908) contre les Hottentots et les Hereros. Blessé à l’œil, il part en convalescence en Afrique du Sud où il se lie d’amitié avec Jan Smuts, contre lequel il se battra plus tard. Il sert ensuite au Cameroun allemand.

Le 14 avril 1914 il est nommé commandant des forces allemandes de la colonie de l’Afrique Orientale Allemande. Il dispose de 200 officiers européens et de quelques compagnies d’indigènes Askars (environ 3 000 hommes). Ouvert d'esprit et parfait gentleman, il parle couramment les langues indigènes et est hautement respecté par tous les hommes servant sous ses ordres.

Malgré les pactes conclu entre les politiciens locaux allemands et anglais, ignorant les ordres de Berlin de respecter un accord de non-agression et convaincu par ailleurs que les Anglais rompraient ce pacte les premier, il anticipe un assaut amphibie des forces britanniques contre la colonie allemande et organise la défense de la ville de Tanga contre laquelle fut effectivement menée une attaque britannique du 2 au 5 novembre 1914. L’attaque menée par les 8 000 Indiens réservistes aux ordres du général Arthur Aiken tourne rapidement au désastre, et le 4 novembre les 1 100 hommes de Lettow-Vorbeck obligent les Indiens à réembarquer sans armes ni bagages. Vorbeck pousse ensuite son avantage et porte la guerre contre le réseau ferroviaire anglais en Afrique de l’Est Britannique. Le 18 janvier 1915 il écrase à nouveau les Anglais à la bataille de Jassin, les obligeant à se rendre.

Pendant toute l’année et le début de l’année 1916, les troupes allemandes (95% d’indigènes parfaitement équipés, entraînés et adorant leur commandant), en très nette infériorité numérique, mènent une dure guerre de guérilla contre les forces anglaises au cœur des provinces britanniques du Kenya et de la Rhodésie.

En mars 1916 les Britanniques et les Sud-Africains sous les ordres de Jan Smuts lancent alors une formidable offensive avec plus de 45 000 hommes pour éradiquer une fois pour toutes la petite armée africaine du Kaiser. Campagne épuisante car soit Lettow-Vorbeck se dérobe lorsqu’il est en infériorité numérique, soit il combat uniquement lorsqu’il est en position de force. Les Anglais s’épuisent. Il faut l’intervention en septembre 1916 des troupes belges du Congo qui prennent la ville de Tabora après de furieux combats et la victoire qu’ils infligent début 1917 aux Askaris à Mahenge pour que le sort des armes penche du côté des alliés.

A partir du printemps 1917, Lettow-Vorbeck ne peut empêcher l’avance des troupes Britanniques dont les effectifs sont de plus en plus importants, en sus de l’aide des troupes belges, sud-africaines et portugaises. Tout en reculant, il parvient chaque fois à s’échapper et inflige même, en octobre 1917, une sévère défaite aux Anglais dans les marécages de Mahiwa. Après cette affaire, il passe au Mozambique, y attaque les garnisons portugaises et reconstitue partiellement son armée (bataille de Negomano, 28 novembre 1917).

Au printemps 1918, rééquipé et reposé, il revient au Tanganyika, divise ses troupes en 3 colonnes, refuse les combats et soudain, en août 1918, vire à l’ouest et attaque la Rhodésie, surprenant totalement ses ennemis. Le 13 novembre, ses troupes s’emparent de la ville de Kasama, que les Anglais viennent d’évacuer.

Le lendemain, le général Von Lettow-Vorbeck apprend par télégramme que l’armistice est signé depuis deux jours. Le 23 novembre, à Abercorn, il se rend aux forces britanniques de Smuts, avec son armée invaincue.

Après la guerre, Lettow-Vorbeck organise le rapatriement des soldats allemands et des prisonniers de guerre et veille à ce que ses soldats africains ne soient pas inquiétés.

De retour en Allemagne en janvier 1919, il a droit, avec sa Schutztruppe, à une parade à la Porte de Brandebourg, cas unique pour une armée allemande lors de la guerre.

Foncièrement nationaliste, il s’engage alors dans l’activisme et combat la révolution qui secoue l’Allemagne. Il participe notamment avec son corps franc et en lien avec la brigade Ehrhardt à la répression de l’insurrection ouvrière du 23 juin 1919 à Hambourg. Peu après, impliqué dans le coup d’état de Kapp, il est arrêté et incarcéré, puis mis à la retraite d’office. Il devient alors marchand de vin en gros à Brême. Député du Parti National Allemand de 1929 à 1930 ce nationaliste s’oppose vigoureusement aux nazis, car foncièrement antiraciste. Il décline en 1933 la proposition de Hitler d’entrer au NSDAP et refuse tout embrigadement idéologique.

En 1945 il se fixe à Hambourg et, comme il n’a pas de retraite, devient jardinier. C'est finalement son ancien adversaire, Jan Smuts, qui réunit une souscription d’officiers britanniques et sud-africains pour lui permettre de vivre. En 1957 il publie sa biographie et deux ans plus tard effectue un voyage au Tanganyika où il est accueilli avec enthousiasme. Il décède à Hambourg le 9 mars 1964. La république fédérale décide alors de pensionner les survivants africains de l’épopée.

Liebknecht Karl

Révolutionnaire allemand, fondateur du mouvement Spartacus et pacifiste.

Fils de Wilhelm Liebknecht, le fondateur du parti social-démocrate allemand (SPD, en 1869) et le chef du socialisme allemand, Karl Liebknecht (Leipzig, 13 août 1871 - Berlin, 15 janvier 1919) entre en politique au début du XXè. Il est alors avocat et l’un des fondateurs du mouvement des Jeunesses socialistes. Membre en 1908 de l’Assemblée de Prusse et en 1912 du Reichstag, il se range à l’extrême gauche du groupe social-démocrate. Son énergie créatrice, passionnée et infatigable, en fait rapidement une personnalité politique de premier plan. Bien qu’il soit résolument opposé à la guerre, il se résigne au début du premier conflit mondial à suivre la consigne du parti et il vote les crédits de guerre. Mais, dès décembre, il est seul parlementaire à s’opposer à la poursuite des hostilités.

Après sa mobilisation comme soldat dans l’armement, il organise le 1er mai 1916 à Berlin une manifestation publique contre la guerre, ce qui entraîne sa condamnation à quatre ans de pénitencier. Depuis le mois de janvier précédent, il publie les « Lettres de Spartacus », et fonde en 1917 la Ligue spartakiste qui donnera naissance après la guerre (décembre 1918) au parti communiste allemand (KPD). Après avoir été amnistié en octobre 1918, il dirige la Ligue en compagnie de Rosa Luxemburg.

Depuis la révolution d’Octobre 1918, il tente de créer une république socialiste sur le modèle bolchévique. Pendant quelques mois, il s’efforce d’arracher le pouvoir aux sociaux-démocrates majoritaires. Lors du soulèvement spartakiste de janvier 1919 à Berlin, il est arrêté avec Rosa Luxemburg et exécuté par des officiers des corps francs.

Lloyd George David

Homme politique anglais, ministre des munitions puis premier ministre.

David Lloyd George, premier ministre. - G. Brun, d'après un portrait des années 1920, Harris and Ewing .

David Lloyd George (1863-145—945) naît à Manchester d’un père instituteur qui décède alors qu’il n’a qu’un an. Il fait des études de droit entre 1879 et 1884 et se lance dans la politique. Élu député libéral en 1890, il s'affirme comme un impétueux nationaliste gallois et se situe à l'aile gauche de son parti. Ministre du commerce (Gouvernement Campbell-Bannerman), il développe la flotte marchande et la construction du port de Londres. Chancelier de l'Échiquier (1908-1915), Lloyd George développe ses projets sociaux, introduit en 1911 la loi sur les assurances sociales et restreint le pouvoir des lords.

En 1915, suite à la crise des obus, il est nommé Ministre des Munitions (1915-1916), puis Premier ministre le 7 décembre 1916 suite à la démission du gouvernement Asquith. Avec le soutien des conservateurs, il mène le pays avec autorité et efficacité jusqu'à la victoire, imposant notamment aux généraux britanniques le commandement unique des forces alliées, confié à Foch. Il se montre un habile négociateur lors de la conférence de paix, cherchant un moyen terme entre les positions de Wilson et de Clémenceau.

En 1921, il reconnaît l'État libre d'Irlande mais, abandonné par les conservateurs sur la question d’Orient, il doit démissionner.

Après la lourde défaite du parti libéral en 1929, il se retire de la vie politique. En 1940, il refuse pour raison de santé de participer au cabinet de guerre de Winston Churchill.

David Lloyd George décède le 26 mars 1945 à Llanystumdwy.

Looff Max

Commandant de marine d'origine alsacienne, combattant dans la petite armée allemande d'Afrique orientale.

Né à Strasbourg (1874-1954) Max Looff entre en 1891 dans la marine impériale en tant que cadet, puis à l'école de marine de Kiel où il devient aspirant de marine. Jusqu’en 1902 il sert sur divers bâtiment, notamment au Japon et en Chine lors de la guerre des Boxers.

De 1902 à 1904 il suit les cours de l’Académie de Marine à Kiel et est nommé capitaine-lieutenant, chargé notamment de l'artillerie côtière. Il passe successivement capitaine de corvette (1908), capitane de frégate (1913) et commandant de bord du croiseur SMS Königsberg le 1 avril 1914.

Le croiseur est en mission en Afrique orientale allemande au moment de la déclaration de guerre. Sa mission est d’effectuer la guerre commerciale dans l'Océan Indien et de tenter de retourner en Allemagne. Mais après quelques petits succès initiaux, le Königsberg, à court de charbon et en fort mauvais état matériel, se cache dans le delta du Rufiji à 160 km de Zanzibar, dans l'espoir de réparer ses chaudières. C’est là que la marine britannique le repère et tente plusieurs fois, entre décembre 1914 et juillet 1915, de la détruire, en vain. Finalement, le 11 juillet 1914, il subit un important bombardement et des attaques d’avions torpilleurs. Gravement endommagé, il se saborde sur ordre de Looff. Trente huit marins sont morts, mais le commandant parvient à sauver les pièces d’artilleries principales et à échapper aux Anglais avec le reste de son équipage.

Les rescapés rejoigne la petite armée du colonel Lettow-Vorbeck et à combattre avec lui dans la campagne d’Afrique Orientale. Durant deux ans, Looff se bas à la tête de ses fusiliers-marins, avant d’être finalement fait prisonnier en novembre 1917 par les Britanniques.

Libéré le 26 février 1919, il revient en Allemagne et participe au célèbre défilé de Lettow-Vorbeck à Berlin. Nommé à Kiel à l'inspection des torpilleurs et des bâtiments de la marine de guerre, il est élevé au grade de contre-amiral le 1er janvier 1921. Il donne sa démission de la marine le 6 mars 1922, se consacre à l'écriture et à la rédaction de ses services en Afrique orientale allemande et à ses exploits à bord du SMS Königsberg, puis à terre avec ses unités de fusiliers-marins.

Il décède le 20 décembre 1954 à Berlin.

Ludendorff Erich

Général allemand, adjoint de Hindenburg, "patron" de l'armée allemande et quasi dictateur de l'Allemagne entre 1916 et 1918.

Erich Ludendorff : l'éminence grise de l'Empereur... et le maître d'un Reich militarisé. - >G. Brun, d'après un portrait d'un artiste anonyme, 1917.

Avant la guerre

Erich Ludendorff naît en 1875 à Kruszewnia (Province de Posen, Pologne), fils d’un noble hobereau prussien. Formé dans l’école militaire des Cadets à Plön et Groß-Lichterfelde près de Berlin puis admis à l'Académie de guerre (1893). Entré dans l’Etat-Major-Général en 1882, il participe, sous les ordres de Schlieffen et de Moltke à l’élaboration du plan d’invasion de la France, appliqué en 1914. Chef de la division « opérations » (1908-1912), il obtient diverses améliorations de l'armée, mais l'excès de ses exigences entraîne son départ pour la 85e brigade à Strasbourg. En 1908 il épouse Margarete Schmidt, la fille d’un industriel.


Sur le front est

Le 6 août 1914 il s’empare de Liège à la tête de sa brigade, ce qui lui vaut la distinction „Pour le Mérite“. En septembre il part en Prusse Orientale il devient le chef d’Etat major de la 8ème armée de Paul Von Hindenburg et remporte les batailles de Tannenberg (26-30 août) et des lacs de Mazurie (7-15 septembre 1914 et 22-27 février 1915). Il devient de fait, plus encore que Hindenburg, le véritable chef des opérations sur le front Est. Mais son plan, consistant à concentrer des forces massives sur le front oriental pour obtenir une victoire décisive, est rejeté par le grand quartier général dirigé par Falkenhayn. Il en éprouve un ressentiment terrible.

Lorsque Falkenhayn échoue le 11 juillet 1916 dans sa dernière tentative contre Verdun, Hindenburg, généralissime des armées des Empires centraux et Ludendorff, « premier quartier-maître général » (adjoint au commandement suprême, poste spécialement créé pour lui), qui tous deux passent pour « imbattables » depuis Tannenberg, prennent les choses en main. Avec le soutient de certains hommes politiques, dont Stresemann, il exigent la place sur le front ouest de Falkenhayn, et l’obtiennent le 16 août.


Le « partron » de l’armée et de l’Allemagne

Dans les faits, Ludendorff devient le véritable chef d’Etat-Major, éclipsant Hindenburg, et exerçant bientôt une action croissante sur le gouvernement : il est bientôt le véritable maître de l’Allemagne et installe une véritable dictature militaire. Il impose la mobilisation de toutes les ressources, la guerre sous-marine à outrance (ce qui entraîne la guerre avec les Etats-Unis) et l'extension des buts de guerre à l'Est. Il provoque la chute du chancelier Bethmann Hollweg (13 juillet 1917), puis se brouille avec ses successeurs Michaelis et Hertling. Puis il suscite le boycott des résolutions de paix de la majorité parlementaire et organise la mobilisation en vue de la guerre totale en mettant au point le « programme Hindenburg » (doublement de la production militaire). Il impose à Lénine début 1918 les très dures conditions de paix de Brest-Litovsk.

Mais sur la plan militaire, Ludendorff, après avoir éliminé la Russie, court d’échec en échec sur le front occidental : c’est d’abord la Kaiserschlacht (21 mars – 18 juillet 1918), puis le « Friedensturm » ou seconde bataille de la Marne (18-20 juillet), enfin les contre-attaque des Alliés ou « offensive des 100 jours ». Le 8 août 1918, il qualifie la bataille d’Amiens de « Jour de deuil de l’armée allemande » et passe tout-près d’un effondrement nerveux.

Fin septembre 1918, conscient de la défaite allemande, il demande l’ouverture rapide de négociations en vue d’un cessez-le-feu, ainsi qu’une démocratisation de la Constitution du Reich. Ces deux demandes surviennent trop tard. La réponse du président américain Wilson ne laisse entrevoir que l’éventualité d’une « paix humiliante ».Il se ravise alors et exige la poursuite de la guerre par des moyens extrêmes. Mais le nouveau chancelier, Max de Bade, rejette sa proposition. Le 26 octobre, il quitte ses fonctions, mettant en avant la fameuse théorie de l’armée allemande victime du « coup de poignard dans le dos » qui fera florès. La dictature militaire qu’il a mise en place est sans aucun doute la cause du déclenchement de la révolution de novembre 1918 qui mettra fin au régime et au conflit.


L’aventurier de l’après guerre

S’étant réfugié en Suède, il revient en Bavière en 1919 et tente de revenir sur la scène politique. Il se lie avec les mouvements d’extrême droite, soutient le putsch de Kapp et combat la république de Weimar. Il se lie à partir de 1920 à Adolph Hitler, sans se rendre compte qu’il n’est que l’instrument des nazis. Il participe au putsch raté de Hitler en novembre 23, n’est pas inquiété, et est élu député nationaliste en 1924. En 1925 il est le candidat des nazis aux élections présidentielles, mais ne recueille le 29 mars que 1,1% des voix au premier tour, face à son ancien supérieur, Paul Von Hindenburg.

Il divorce la même année et épouse l’année suivante Mathilde Von Kemnitz avec laquelle il fonde la « Ligue de Tannenberg », un mouvement mi philosophique mi religieux, sorte de secte religieuse prônant un néo paganisme germanique combattant les forces « supra-étatiques » comme les Jésuites, les francs-maçons, les Juifs, les communistes. Il rompt en 1928 avec le parti nazi, fonde en 1930 une sorte d’église allemande, le « Deutschvolk », devenant de plus en plus sectaire.

En septembre 1933 le régime nazi interdit la « Ligue de Tannenberg » et le « Deutschvolk ». Il rédige en 1935 la « Guerre totale » dans lequel il milite pour une « régénération » de l'Allemagne par l'élimination des Juifs et des francs-maçons, mais refuse la même année la dignité de Maréchal que lui offre Hitler.

Il s’éteint le 22 décembre 1937 à l’âge de 72 ans.

Lux Albert Josef

Pilote alsacien engagé volontaire dans l'armée allemande.

Né à Strasbourg en 1896, Lux Albert s’engage comme volontaire dans l’armée allemande. Incorporé à la Flieger-Abteilung n°4 à Strasbourg, il obtient son brevet de pilote en juin 1916 et rejoint en avril 1917 la Bayerische-Flieger-Abteilung A 293, puis en novembre 1917 l’escadrille 27 (Jagdstaffel 27), alors commandée par Hermann Göring. Il totalise 7 victoires entre le 1er avril et le 5 septembre 1818.

A la fin de la guerre, il se voit refuser d’entrer dans l’aviation française. Mais il travaille dans les services secrets français entre les deux guerres, combat l’Allemagne nazie au sein de la Résistance, puis en 1944 dans la 1ère armée française. Il décède à Strasbourg en 1954.

Luxemburg Rosa

Révolutionnaire allemande, co-fondatrice du mouvement Spartacus et du parti communiste allemand.

Rosa Luxemburg, la révolutionnaire spartakiste. - G. Brun, d'après un portrait photographique.

Fille d’un riche commerçant juif, Rosa Luxemburg naît le 5 mars 1870 et grandit dans la petite ville russo-polonaise de Zamosc. Elle devient une adepte du socialisme et, après des études d’économie politique à Zurich, elle fonde le parti social-démocrate du royaume de Pologne, dont elle devient la dirigeante.

En 1897, en raison de son activité révolutionnaire, elle doit émigrer en Allemagne où, après avoir acquis la nationalité allemande grâce à un mariage blanc avec Gustav Lübeck en 1895, elle détient rapidement des fonctions de premier plan au sein de l’aile radicale de la social-démocratie et milite tant en Allemagne qu’en Russie où elle participe à l’agitation révolutionnaire de 1905.

D’obédience marxiste, elle enseigne l’économie nationale à l’école du parti de Berlin et développe ses propres théories pour lutter contre le révisionnisme incarné par Edouard Bernstein. En 1913 paraît l’« Accumulation du capital », son œuvre maîtresse, dans laquelle elle expose sa théorie de l’impérialisme. Pendant la Première Guerre mondiale, elle fonde avec Karl Liebknecht la Ligue spartakiste (Spartakusbund). Mais en raison de son activisme pacifiste, elle se retrouve presque sans discontinuité en prison (1915-1916). C’est là qu’elle écrit ses célèbres « Lettres de prison ».

Après la révolution de novembre 1918, elle adhère au parti communiste (DKP) dont elle rédige le programme (fin décembre 1918). Elle condamne le soulèvement spartakiste de janvier 1919 à Berlin qu’elle juge prématuré. Elle est cependant arrêtée par des officiers des corps francs qui participent à la répression durant la semaine sanglante (6-13 janvier 1919). Son corps est retrouvé plusieurs mois plus tard dans un canal berlinois. Comme celui de son compagnon Liebknecht, son enterrement donne lieu à une grande manifestation.

Lvov Gueorgui Ievguenievitch, prince

Prince de la famille des Romanov, président du premier gouvernement provisoire à l'abdication du tsar.

Le prince Lvov naît à Dresde en 1861, dans une famille noble descendant des princes de Yaroslavl. Sa famille s’installe peu après sa naissance dans la région de Toula, au sud de Moscou. Diplômé en droit de l’université de Moscou, il travaille dans la fonction publique jusqu’en 1893. Il se lance dans la politique au sein du Parti constitutionnel démocratique, et est élu à la première douma en 1906 et est nommé ministre. Il devient président de l’union « Panrusse » de Zemstvos en 1914.

En mars 1917, il est un des dirigeants de la révolution qui pousse le tsar à l’abdication, et devient le président et le ministre de l'Intérieur du premier Gouvernement provisoire (mars 1917), puis du second (mai 1917), en coalition avec les socialistes, et dans lequel Kerenski joue un rôle de plus en plus important. Il démissionne en juillet 1917 suite à la répression contre les manifestations de Petrograd. Après la victoire des bolcheviks lors de la révolution d’octobre, il se réfugie à Paris où il meurt le 7 mars 1925.

Lyautey Louis Hubert

Maréchal de France, "pacificateur du Maroc", ministre de la guerre.

Le maréchal Lyautey. - G. Brun, d'après un portrait photographique anonyme.

Louis Hubert Gonzalve Lyautey (17 novembre 1854 - 27 juillet 1934) naît dans une famille d’origine franc-comtoise installée en Lorraine, de tradition militaire très ancienne. Enfant, victime à Nancy d’une chute, il reste fréquemment et longtemps alité et se passionne pour la lecture et se grise pour les récits d’aventure, de missionnaires, de voyageurs… ainsi que pour l’épopée napoléonienne.

Envoyé à Paris au lycée Sainte Geneviève, il prépare le concours d'entrée à l'École polytechnique. Mais, marqué par la défaite de 1870, il entre en 1873 à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr. Il en sort officier et mène à Paris une vie mondaine, bientôt doublée d’une profonde quête spirituelle. Il fréquente les cercles catholiques, subit l’influence d’Albert de Mun et bientôt ne cache plus ses opinions légitimistes dans une France républicaine et laïque. Il se pose même la question d’une possible vocation religieuse.

En 1875 il est affecté au 26ème bataillon de chasseurs à pied. En 1877 il découvre l’Algérie lors d’un voyage, en revient enchanté et se fait affecter au 2ème Régiment de Hussards qui précisément est transféré en Algérie. Conquis par l’orientalisme, il critique la politique coloniale française et prône un « système plus civilisé et plus humain ».

Promu capitaine en 1882, il est muté au 4ème Régiment de Chasseurs à Cheval à Bruyères. Il profite d’une permission pour effectuer une mission auprès du Pape Léon XIII, mission dont le charge le comte de Chambord exilé à Görlitz, afin d’empêcher le souverain pontife à se rallier à la République. L’audience du pape, le 18 mars 1883, le déçoit dans ses espoirs légitimistes.

Les années passées en France lui permettent de s’initier à la tactique militaire, de se lier avec de nombreux écrivains et artistes, de se forger des idées novatrices sur la fonction de l'Armée. En 1891, il publie un long article dans la Revue des deux Mondes sur le Rôle social de l'officier. Ce texte crée un important débat, parce qu'il défend l'action éducatrice de l'Armée, au-delà de sa fonction purement militaire.

En 1893 il est nommé chef d’escadron au 12ème Hussards à Gray, puis serte en Indochine entre 1894 et 1897, dans le corps d’occupation puis au bureau militaire du gouverneur Rousseau. Il y rencontre Gallieni qu’il rejoint ensuite à Madagascar (1897-1902) : cette rencontre le marque profondément et lui fera appliquer au Maroc l’expérience acquise au service du peuple « Colonisé ». Lors de l’affaire Dreyfus, il prend parti pour le capitaine.

De retour de Madagascar, il monte en grade et, général de division, il obtient en 1908 le commandement de la division d'Oran, à la frontière du Maroc. Il est chargé en mars 1907 d'occuper Oujda, réprime le soulèvement dans la région des Béni-Snassen et est nommé haut-commissaire du gouvernement pour la zone marocaine occupée dans la région d'Oujda.

En mars 1912, après la signature de la convention de Fès établissant le Protectorat français sur l'Empire chérifien, il devient le premier résident général et entreprend la « pénétration pacifique » du Maroc, malgré le début de la Première Guerre mondiale.

En décembre 1916 il est appelé à Paris par Aristide Briand et nommé ministre de la guerre, ministère dont il démissionne en mars 1917 pour retourner au Maroc où Gouraud l’avait remplacé.

Il retourne ensuite au Maroc et est fait maréchal de France en 1921. Mais, sous le gouvernement de Paul Painlevé, il se voit retirer le commandement des troupes engagées contre la rébellion d’Abd-el-Krim. Lyautey démissionne à 71 ans et rentre définitivement en France en 1925, alors que Pétain écrase la révolte marocaine dans le sang.

Lyautey s’installe à Thorey en Meurthe-et-Moselle où il se fait construire un château. En 1931, il organise dans le Bois de Vincennes l'Exposition coloniale internationale dont il est le commissaire général. Il décède à Thorey le 27 juillet 1934. Son corps, transféré à Rabat en 1935 sera inhumé aux invalides en 1961.