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Sous la direction de Georges Brun
Homme politique grec, premier ministre responsable de l'entrée en guerre de la Grèce aux côtés de l'Entente.
Elefthérios Venizélos (1864-1936) naît en Crète et sa jeunesse est marquée par l’enosis, la lutte de la Crète contre l’empire ottoman et son rattachement à la Grèce. Il devient avocat en 1887, se lance dans le journalisme et la politique, et est élu en 1889 député libéral à l‘assemblée de la Crète. Il participe à la révolte de la Crête en 1897-1898 qui conquiert son autonomie, et dont il écrit la constitution. Il est ministre de la justice de la Crête entre 1898 et 1901 mais s’oppose rapidement au Prince Georges, le haut-commissaire de la Crête autonome, qui refuse le rattachement à la Grèce. En 1905 il prend la tête d’une insurrection qui s’achève par le départ du prince Georges : la Crête est rattachée à la Grèce en 1907 (officiellement en 1913). La réputation de Venizélos gagne la Grèce.
Le 28 août 1909, les officiers de l’armée grecque, formés en ligue, se révoltent à la caserne Goudi et exigent du gouvernement de nombreuses réformes sociales, politiques, économiques et militaires, sans remettre en cause le principe de la monarchie. La situation s’enlise et bientôt Venizélos apparaît comme incontournable. Après de nombreuses négociations où il joue le rôle de médiateur, il est nommé premier ministre en octobre 1910. Il lance immédiatement de grandes réformes, mais ses relations avec le roi Georges I (1863-1913) restent très tendues. En 1912, il fait participer son pays à la première guerre des Balkans, ce qui permet à la Grèce de récupérer le sud de l'Épire, la Macédoine du Sud et la plupart des îles de la mer Égée.
Pendant la Première Guerre mondiale, Venizélos, partisan de l’entrée en guerre de son pays aux cotés de l’Entente, s'oppose au nouveau roi Constantin Ier (1913-1917), soucieux d’une stricte neutralité bien que germanophile. La mésentente entre le ministre et le roi aboutit à la rupture et à la guerre civile larvée : soutenu par les Alliés qui débarquent à Thessalonique, Venizélos forme un gouvernement dissident à Thessalonique en octobre 1916 : c’est le début du « schisme national ».
Le 11 juin 1917, sous la pression française, le roi Constantin démissionne en faveur de son second fils Alexandre. Venizélos, qui avait promis aux Alliés à engager la Grèce à leur côté, devient le véritable maître de la Grèce. La Grèce entre effectivement dans le conflit et obtient, aux traités de Neuilly-sur-Seine et de Sèvres de nouveaux agrandissements territoriaux (Thrace orientale, Dodécanèse). Venizélos est alors au faîte de sa popularité.
Cependant, le traité de Sèvres n’est pas reconnu par Atatürk, nouveau maître de la Turquie, et un nouveau conflit oppose les deux pays dès 1920. Par ailleurs, le roi Alexandre meurt brutalement le 25 octobre 1920. Les royalistes réclament alors le retour de Constantin, et les élections de novembre sont, en dépit de sa popularité, un désastre pour Venizélos et son parti. Il s’exile à Londres alors que Constantin remonte sur le trône.
La guerre contre la Turquie tourne au désastre pour la Grèce que les alliés français et anglais ne soutiennent plus. La défait provoque un coup d’état des militaires qui chassent Constantin du trône le 14 septembre 1922. Le militaires chargent Venizélos de la négociation de paix avec la Turquie : il parvient à éviter le pire (La Grèce se retire définitivement d’Asie-Mineure) et signe le traité de Lausanne le 24 juillet 1923.
Le 27 octobre 1923 le « contre-coup d’état » royaliste de Métaxas échue et convainc les généraux démocrates d’établir la république : le roi Georges II est éloigné contre l’avis de Venizélos, de retour d’exil. Il est néanmoins nommé premier ministre le 11 janvier 1924, mais démissionne peu après et repart en exil. La république est proclamée le 25 mars 1924. Des nouvelles réformes sont lancées, deux tentatives de coup d’état évitées, mais l’instabilité politique demeure, aucun parti ne parvenant réellement à s’imposer, le principal, qui soutient Venizélos (Parti libéral), étant sans chef.
Les élections du 19 avril 1928, sont un triomphe pour le Parti libéral, mais surtout pour son chef Venizélos. Il devient donc Président du Conseil de 1928 à 1932. Il mène une politique de rapprochement avec la Turquie et la Bulgarie, réforme l’enseignement, assainit les finances publiques, met en place une nouvelle réforme agraire, développe les communications. Mais la crise de 1929 frappe durement le pays et aux élections de 1932, le Parti libéral est battu. Il subit un nouvel échec cuisant le 5 mars 1933 face au parti royaliste.
Le 1er mars 1935 le général Plastiras tente un nouveau coup d'État, avec le soutien de Venizélos, pour éloigner les royalistes du pouvoir. C’est un échec, l’insurrection est matée et Venizélos parvient non sans peine à s’échapper et à s’installer à Paris. Là, il apprend, tour à tour, sa condamnation à mort, le retour du roi Georges II de Grèce au pouvoir puis son amnistie. Malade, c'est en exilé qu'il meurt à Paris le 18 mars 1936.
Militant ultra-nationaliste, assassin de Jean Jaurès.
Raoul Villain (1885-1936) est le fils d’un greffier en chef du tribunal de Reims. Sa mère est atteinte d’aliénation mentale dès 1887. Il suit ses études chez les Jésuites puis au lycée de Reims, études qu’il interrompt pour s’inscrire en 1905 à l'école nationale d'agriculture de Rennes. Il contracte la typhoïde et échappe de peu à la mort. En novembre 1906, il est incorporé au 94e régiment d'infanterie à Bar-le-Duc mais est réformé au bout de quelques mois. Il passe son diplôme d’agriculture en 1909, travaille un peu à Rethel puis revient à Reims, part ensuite en Alsace, vient à Paris et tente de préparer son bac au collège Stanislas où il est surveillant. Mais il se fait renvoyer de son poste pour manque d’autorité. En 1912 il séjourne un temps à Londres puis à Lougthon, voyage en Grèce et en Turquie (mars-avril 1913). En juin 1914, il s'inscrit à l’École du Louvre. Il manifeste alors les premiers signes d’un profond déséquilibre : exalté, instable, atteint de mysticisme religieux… Il est membre du Sillon de Marc Sangnier et adhérent de la « Ligue des jeunes amis de l'Alsace-Lorraine », groupement d'étudiants ultra-nationalistes d'extrême droite qui s’en prennent particulièrement au pacifisme de Jaurès.
Villain se met peu à peu en tête l’idée de la nécessité de tuer Jaurès. Il achète un revolver et commence à traquer le chef socialiste. Le vendredi 31 juillet 1914 à 21 h 40, Jaurès soupe avec ses collaborateurs au Café du Croissant, 146 rue Montmartre à Paris. Raoul Villain tire deux fois de puis la rue, par la fenêtre ouverte. Jaurès, atteint d’une balle dans la tête, s’effondre.
Après une petite poursuite, Villain est arrêté par Tissier, metteur en page de L'Humanité et un policier. Il est incarcéré à la prison de la Santé durant toute la durée de la guerre dans l’attente de son procès. Ce procès s’ouvre le 24 mars 1919. Après un procès de cinq jours et une courte délibération, Raoul Villain est acquitté.
Cet acquittement provoque de nombreuses manifestations, et en avril 1919 doit s’enfuir d’Auxerre pour se réfugier à Paris où il est à nouveau arrêté le 19 juillet 1920 pour trafic de monnaie. Libéré le 23 juillet 1920, il n’est condamné, le 18 octobre 1920, par la 11ème chambre correctionnelle qu’à cent francs d’amende en raison de son état mental. En septembre 1921, il se tire deux balles dans le ventre dans le cabinet de son père pour protester contre l'opposition de ce dernier à un projet de mariage.
Il s’expatrie à Dantzig puis à Memel et enfin à Ibiza où, grâce à un héritage, il vit dans un petit hôtel. « El boig del port » (le fou du port) se met en tête de construire une villa bizarre en bord de plage avec quelques amis, dont le petit-fils de Gauguin. Lorsqu’éclate la guerre civile espagnole, la garnison d’Ibiza se rallie aux franquistes le 20 juillet 1936. Les républicains de Barcelone décident de s’emparer de l’île et le 10 septembre 1936 une colonne d’anarchistes s’empare de la ville. L’aviation italienne, en représailles, bombarde l’île les 12 et 13 septembre. Dans le chaos créé, les anarchistes exécutent Raoul Villain : il est possible qu’ils ne connaissaient pas son identité).
« J'ai abattu le porte-drapeau, le grand traître de l'époque de la loi de trois ans, la grande gueule qui couvrait tous les appels de l'Alsace-Lorraine. Je l'ai puni, et c'était le symbole de l'ère nouvelle, et pour les Français et pour l'Étranger. » (Lettre à son frère, 10 août 1914).
Général français, chef de la VIIè armée française sur le front des Vosges.
Étienne Godefroy Timoléon de Villaret (1854-1931) est issu d’une famille de très vieille noblesse : deux de ses ancêtres furent grands maîtres de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem au tout début du XIVè siècle. Né dans le château familial de Floyras, il suit des études à Toulouse puis entre à Saint-Cyr en 1872. Il en sort sous-lieutenant et choisit d’entrer dans les chasseurs à pied. Il continue à se former à l'école de tir du Ruchard et à l'école de gymnastique de Joinville.
Il est nommé en Afrique du nord entre 1877 et 1884 avec une interruption de deux ans pour se former à l'École supérieure de guerre dont il sort avec la mention très-bien.
En août 1884, il est envoyé en mission au Japon en qualité d’instructeur militaire ; il y vit pendant trois ans et reçoit le 28 décembre 1886 l'Ordre du Soleil levant.
De retour d'Extrême-Orient par l'Indochine, les Indes, Ceylan, il est nommé au ministère de la Guerre, où il s'occupe particulièrement des armées étrangères. Le 22 mars 1888, il épouse à Toulouse Gabrielle Marie-Madeleine Laffont et demande peu après à rentrer dans la troupe où il exerce successivement divers commandements. Le 24 décembre 1894, il était promu chef de bataillon au 54ème RI à Avignon et, le 18 novembre 1897, mis hors cadre et nommé à l'emploi de chef d'état-major de la 30ème division. Il est promu lieutenant-colonel. Il est ensuite affecté à Bellac, Limoges, Marseille, Auch, Vannes et Commercy où il est promu général de brigade. Il se spécialise dans la guerre de montagne. Envoyé en Grèce en avril 1914 pour une mission militaire, il rentre précipitamment et prend le commandement à Belfort de la 14e division de l’Armée d’Alsace commandée par le général Pau.
Le 19 août, il entre à Mulhouse après les durs combats de Dornach. Mais le 24 il a ordre de se retirer et le 25 la 12ème division est transportée vers Amiens, engagée à Proyart-Vauvillers en Somme le 29, dans la bataille de l’Ourcq du 6 au 10 septembre, freinant l’avance allemande, puis dans la bataille de l’Aisne, lors de la contre-attaque de la Marne. Nommé général de division, il reçoit le 17 novembre le commandement du 7ème corps d'armée.
Le 27 novembre 1914, à Vingré (Nouvron-Vingré, au nord-ouest de Soisson) des soldats du 298ème R.I. sont surpris par une attaque allemande. Deux escouades (24 hommes) sont délogées de leur tranchée, battent en retraite, mais la tranchée est rapidement reprise. Les 24 hommes sont alors accusés d'abandon de poste en présence de l’ennemi. Lors de l'enquête sommaire, les soldats affirment avoir reculé sur ordre du sous-lieutenant Paulaud. Ce dernier soutient ne pas avoir donné cet ordre et accable les 24 soldats. Le 3 décembre, un conseil de guerre spécial, suivant les directives données par le général de Villaret pour aider les combattants à retrouver le goût de l'obéissance, désigne par tirage au sort six d’entre eux : le 4 décembre 1914, ils sont fusillés pour l'exemple. Ils seront réhabilités le 29 janvier 1921 et le lieutenant Paulaud inculpé pour faux témoignage, sera acquitté. Les historiens contemporains mettent l'accent sur les responsabilités du général de Villaret. Il est ainsi cité parmi « les officiers qui ont du sang sur les mains » dans cette affaire.
Le 11 mars 1915, à 16 heures, le général de Villaret est grièvement blessé avec le général Maunoury dans une tranchée avancée du plateau de Nouvron. Il est trépané et obtient sur son lit d’hôpital la croix de commandeur de la Légion d'honneur. Il reprend son commandement un mois plus tard, notamment les de la bataille de Champagne en septembre 1915.
Le 3 novembre 1915, il devient le chef de la VIIème armée en remplacement du général de Maud’huy et installe son quartier général à Remiremont. Ses troupes se battent sur le front des Vosges durant toute l’année 1916. Le 19 décembre 1916 il est remplacé par le Général Debeney et mis à la retraite.
Il se retire de la vie publique et décède à Angers le 18 janvier 1931.
Homme politique français, socialiste et pacifiste, président du conseil au début du conflit.
René, Jean, Raphaël, Adrien Viviani, nait en Algérie la 8 novembre 1862 d’un père avocat et conseiller général d’Oran. Après des études de droit à Paris, il devient avocat en Algérie puis à Paris où il est secrétaire de la conférence des avocats. Il adhère aux idées socialistes et en 1893 il est élu député de la Seine en 1893 et réélu en 1895, il sera battu en 1902 par un nationaliste.
Il défend le grévistes de Carmaux (1894), fait voter une loi permettant aux femmes de devenir avocates (1900), milite pour les mesures laïques et anticléricales. Proche de Millerand, Jaurès et Briand, il est l’un des fondateurs de l’Humanité en 1904, dont il est un temps rédacteur en chef. Il participe à l’unification des socialistes dans le SFIO en 1905, et l’année suivante est réélu à l’Assemblée député de la Creuse.
Il accepte le poste de ministre du « Ministère du Travail et de la Prévoyance sociale » en 1906 (1906 – 1910), ce qui le fait exclure du parti socialiste. Réélu député en 1910, il fonde le parti républicain socialiste, refuse des postes ministériels entre 1910 et 1913, revient au gouvernement début 1914, et, après l’échec du gouvernement Ribot, est nommé président du conseil le 13 juin 1914. Il prend en même temps le Ministère des Affaires Etrangères. C’est alors qu’éclate la crise de juillet. Pacifiste, Viviani tente de préserver la paix tut en préparant la mobilisation. Le 1er août, il ordonne la mobilisation du pays (3 août) tout en faisant reculer l'armée à dix kilomètres de la frontière en signe d’apaisement, puis annonce l'entrée en guerre dans un grand discours à la Chambre (4 août). Il met en place un gouvernement d'Union nationale (26 août). Le 29 octobre 1915 il laisse la présidence du conseil à Aristide Briand, obtient le ministère de la justice, et se rend en 1917 avec Joffre aux USA afin d’obtenir leur entrée en guerre. En novembre 1917, le nouveau président du Conseil Georges Clémenceau l’écarte du gouvernement.
Après la guerre il est réélu député (1919) et nommé représentant de la France au Conseil de la Société des Nations (SDN). Elu sénateur de la Creuse le 15 octobre 1922, il est victime d’une crise d’apoplexie le 8 juin 1923 qui le paralysera jusqu’à sa mort le 6 septembre 1925.