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Sous la direction de Georges Brun
Partie de l’armée française composée d’hommes plus âgés le plus souvent affectés à l’arrière du front.
La territoriale est une partie de l’armée, composée d’hommes âgés de 34 à 39 ans, c’est-à-dire nés entre 1875 et 1880. Ces hommes sont affectés à des régiments spécifiques (RIT ou régiment d’infanterie territorial), généralement dans des secteurs tranquilles et sont rarement engagés en première ligne. Surnommés « pépères », les territoriaux sont affectés à des travaux divers ou à des gardes à l’arrière du front.
La territoriale elle-même comporte une réserve, composée des hommes âgés de 40 à 45 ans, c’est-à-dire nés entre 1868 et 1874. Plus tard, même les hommes âgés de 46 à 49 ans c’est-à-dire nés entre 1868 et 1865 seront mobilisés.
Soldat français issu des colonies.
Les « Tirailleurs » sont des soldats issus des colonies formant plusieurs unités de l’armée française. Le mot provient d’une expression : « Progresser en tirailleurs », faisant référence à une tactique de combat : lors d’une attaque, il s’agit de garder une grande distance entre chaque homme et progresser en utilisant le terrain : cette dispersion permet de se protéger, de se camoufler et de diminuer les pertes sous les tirs d’artillerie.
À partir du XIXe siècle, l’armée française forme beaucoup de ces unités légères dans les colonies, notamment en Il en Afrique du Nord, en Afrique noire, en Indochine, mais aussi en Corse. Le tout premier régiment est formé en 1857 au Sénégal, et le nom de « Tirailleur sénégalais » est rapidement adopté pour désigner tous les soldats africains de couleur noire qui se battent sous le drapeau français, les différenciant ainsi des autres tirailleurs (Algériens, Marocains…) Tous ces hommes sont recrutés par réquisition, ce qui provoque de nombreuses mutineries, notamment chez les Bambaras du Mali (1915) et une importante répression.
En 1914-1918, environ 200 000 « Sénégalais » de l'AOF se battent dans les rangs français, dont plus de 135 000 en Europe. Les tirailleurs sénégalais participent à la bataille d'Ypres, à Dixmude fin 1914, à la reprise du Fort de Douaumont en octobre 1916, à la bataille du Chemin des Dames en avril 1917 (7 000 tués sur 16 500 engagés), à la bataille de Reims en 1918. 30 000 d’entre eux y trouvent la mort.
Les tirailleurs algériens, marocains et tunisiens (Turcos) sont 270 000 à être mobilisés en 1914. 155 000 viennent combattre en Europe, formant 19 régiments (dont 1 tunisien) : ils sont pratiquement de tous les combats, faisant preuve de qualités exceptionnelles. 35 900 d’entre eux sont tués.
Quant aux marocains, ils forment en 6 bataillons regroupés dans deux régiments de marche. Les pertes marocaines s'élèvent à environ 25 % de leurs effectifs. Les deux régiments, les 1er et 2e Régiment de marche des tirailleurs marocains (RMTM), sont plusieurs fois cités à l'ordre de l'Armée et décorés de la fourragère.
Près de 100 000 Indochinois originaires d’Indochine (Vietnam, Laos et Cambodge) participent à la guerre. Dès 1915, 4 600 ouvriers rejoignent la métropole pour travailler dans l’aviation. Le gros des troupes débarque à partir de 1916, et constitue 19 bataillons de tirailleurs indochinois (BTI), soit 29 000 hommes, sans compter 9 000 infirmiers et 5 000 conducteurs d’automobiles. 49 000 autres les rejoignent pour travailler dans l’administration ou l’industrie. Les soldats se battent au Chemin des Dames, dans les Vosges et dans l’armée d’Orient.
Type de bombardement d’artillerie.
Arme maîtresse de la guerre de position, l’artillerie connaît un formidable développement, s’adaptant et se diversifiant en fonction des champs de bataille. Du plus petit au plus grand calibre, des tubes courts aux tubes longs, de la pièce sur affût fixe au canon tracté, sur rail ou automoteur, l'artillerie de 14-18 se spécialise et se diversifie. En fonction de leur objectif, les tirs d’artillerie portent des noms différents :
• Le tir de démolition ou de destruction vise l’anéantissement brutal et complet d’un objectif, par un tir fourni et ajusté, avec des projectiles percutants (qui explosent à l’impact).
• Le tir d’écrasement est un tir de démolition de densité particulièrement forte.
• Le tir d’efficacité est un tir sur zone, dense et rapide, effectué immédiatement après le réglage.
• Le tir d’encagement désigne un tir en tenaille (donc produit par au moins deux positions d’artillerie) au plus près de l’ennemi et sur une zone réduite.
• Le tir d’enfilade vise une position ou un cheminement sur la plus grande longueur, généralement de flanc
• Le tir d’interdiction a pour effet d’interdire la circulation en un point de passage alors que toute surveillance est impossible (zone invisible des observatoires, temps de brume ou de nuit).
• Le tir de neutralisation cherche, quand la destruction des organisations ennemies est impossible, à neutraliser le personnel de ces organisations en l’obligeant à demeurer dans les abris et en le démoralisant par la violence du bombardement.
• le tir de barrage est un tir d’artillerie violent et serré qui est soit défensif afin d’empêcher l’adversaire de progresser hors de ses tranchées, soit offensif afin de préparer le terrain à une attaque d’infanterie.
Surnom des soldats britanniques.
« Tommy » est le Surnom des soldats britanniques durant la Première guerre mondiale. L’origine du terme fait débat, mais il est attesté dès le XVIIIe siècle sous la forme « Tommy Atkins » et remonterait à Wellington. Avant la guerre de 1914-1918, son usage est déjà répandu (poème « Tommy » de Rudyard Kipling, 1892). Durant le conflit, le terme est également utilisé par des soldats français et allemands.
Obus d’artillerie des tranchées.
La torpille est un obus de l’artillerie de tranchées lancé par un mortier, « Crapouillot » chez les Français, « Mortar » chez les Anglais, et « Minenwerfer ». En fonction de son calibre et de la pièce qui le tire, sa portée varie généralement de 200 à 1000 mètres et son ogive est courbe.
Nettement moins sollicité mécaniquement que l’obus d’artillerie classique, cet obus à faible vitesse initiale et à faible pression se contente de minces parois en acier et consacre la plus grande partie de son volume au transport de considérables quantités d'explosif puissant (mélinite), jusqu'à 50 à 60 % de son poids total. Une telle charge est capable de niveler des dizaines de mètres de tranchées et de terroriser ses malheureux occupants.
La stabilité de l’engin en vol est le plus souvent assurée par des ailettes, car les tubes des mortiers ne sont pas rayés et la vitesse de l’obus est relativement faible. Selon le type de mortier, c'est soit une queue cylindrique soudée à l'arrière de la bombe qui est insérée dans le tube du mortier (58 mm français), soit toute la section arrière du projectile (Minenwerfer allemand).
« Chez nous, nous en avions de 18, 40 et 100 kilos. Les Boches en avaient d’un kilo qu’ils lançaient comme des grenades. La torpille marche lentement. En entendant le coup du départ de la pièce, on peut la voir monter presque à angle droit, et on l’entend grâce au bruit particulier que font ses ailes en tournant. En déterminant son point de chute, on peut avoir le temps de se garer. Elle est généralement à fusée retardée et s’enfonce profondément en terre où elle éclate avec un bruit épouvantable et surtout démoralisant en faisant des cratères (v.) énormes. Elle est surtout employée pour la destruction des ouvrages, abris ou tranchées. » (C’est à Craonne, sur le plateau…, Journal de route 1914-15-16-17-18-19 de Xavier Chaïla, Carcassonne, FAOL, « La Mémoire de 14-18 en Languedoc, 1997, p. 55-56, Vosges, août 1916).
Ouvrage essentiel de la guerre de position.
HISTORIQUE
Après la bataille des Frontières (Aout 1914) et celle de la Marne (5-10 septembre), les Allemands se replient sur l'Aisne où ils se retranchent. Le Français, toujours adeptes de l’offensive, tentent d’emporter la décision en attaquant sur l’aile ouest de l’armée allemande afin de la déborder : une première offensive entre Oise et Aisne des 5ème et 6ème armées et du BEF échoue. tentent de se déborder l'un l'autre. Côté allemand, après une ultime tentative contre Verdun (Bataille de Saint-Mihiel, 12-13 septembre), des troupes supplémentaires sont amenées sur l’Oise (18 corps d’armée et 3 corps de cavalerie), alors que les Français se renforcent des 2e, 10e et 8e armées, soutenues par le BEF ainsi que les restes de l’armée belge qui a réussi à s’extraire d’Anvers assiégée. Ainsi débutent une série de batailles (25 septembre – 17 novembre) qui vont, aucun belligérant ne l’emportant sur l’autre, stabiliser le front pour plus de trois ans : batailles de Picardie et de l'Artois, bataille de l’Yser, 1ère bataille d’Ypres ou de La Bassée…
Ne parvenant pas à trouver de solutions tactiques concevables, et afin de ménager les hommes épuisés, les états-majors optent pour la défensive et ordonnent de se fortifier sur place. Les deux armées s'enterrent l'une face à l'autre sur un front de plusieurs centaines de kilomètres. Dès fin octobre, apparaissent les premières tranchées : le conflit entre dans « la guerre de position ».
Si les premières tranchées de 1914 sont creusées hâtivement, les premiers mois de 1915, relativement calmes, permettent aux combattants, et particulièrement aux Allemands, sur la défensive (Il veulent « régler » rapidement le « problème russe »), de développer un des systèmes défensifs les plus complexes et aboutis qu'ait connu le monde, sur deux lignes de fortification continues et quasi inexpugnables défendues par des millions d'hommes, s’étendant sur plus de 700 km, de Nieuport en Belgique à la frontière Suisse. Aux tranchées de surfaces correspond un réseau de galeries souterraines, pour abri ou guerre des mines, véritable termitière humaine, dont certaines parties sont même équipées d'éclairage électrique et de systèmes de ventilation… En quelques mois, la tranchée devient un mode de vie pour des millions de combattants.
LE DISPOSITIF
Le dispositif des tranchées de la première guerre n'est pas une simple série de lignes creusées dans la terre, mais une organisation remarquablement complexe s’étendant en profondeur sur plusieurs kilomètres et répondant à quelques critères impératifs :
• Une capacité défensive capable de stopper une attaque ennemie ;
• Une capacité d’hébergement très importante : des centaines d’hommes doivent pouvoir en permanence y vivre, se mouvoir, se préparer à l’attaque ;
• Une grande facilité d’accessibilité depuis l’arrière, tant pour les hommes (montée en ligne et évacuation des blessés et de morts) que pour l’approvisionnement (vivres, eau, munitions) ;
• Une capacité de protection maximale pour les hommes qui l’occupent (bombardements, gaz…) ;
• Adaptabilité aux types de terrains et aux reliefs (sols meubles, sols rocheux, montagnes…)
• Adaptabilité des défenses à l’introduction d’armes nouvelles et aux évolutions techniques et militaires de la guerre moderne (armes de proximité de type mortier ou lance-grenades, gaz, lance-flammes…)
Ainsi apparaissent très rapidement dans les manuels réglementaires des concepts et des normes théoriques guidant la réalisation pratique d'un dispositif de tranchées. Plusieurs catégories de tranchées se différencient chacune par leur fonction.
• La tranchée de tir dite « tranchée de premières lignes », constituant la ligne de front ;
• Le boyau de communication, qui permet de rejoindre, d'approvisionner et d'évacuer la ligne de front ;
• La tranchée d'appui dite « tranchées de seconde ou de troisième ligne » qui constitue le point d'appui et de ravitaillement à la tranchée de première ligne.
A partir de ce système de défensif de base, la tranchée peut se complexifier en fonction du terrain et de la situation stratégique de la zone de front. Autant le système est simple dans les lieux « calmes » comme par exemple dans le sud de l’Alsace, autant il peut se complexifier à l’extrême comme en Artois, Champagne ou Argonne. Il peut alors comporter :
• Des organes de surveillance isolés (petits postes à l’avant de la première ligne) ou reliés par une parallèle de surveillance ;
• La tranchée de première ligne abritant les troupes de garde ;
• La tranchée de seconde ligne ou parallèle de soutien avec troupes de soutien devant contre-attaquer si l'ennemi parvient à pénétrer dans la première ligne) ;
• Les parallèles abritant les troupes de réserve ;
• Les parallèles intermédiaires entre ces lignes ;
• Les boyaux de communication entre les lignes ;
• Des organisations défensives perpendiculaires au front (abris, postes de commandement, casemates de tir, postes de mitrailleuses et de mortiers…)
• Un système de galeries souterraines destinées à la guerre des mines…
LA TRANCHEE DE TIR OU TRANCHEE DE PREMIERE LIGNE OU TRANCHEE DE COMBAT
Large d’environ 1m50, profonde d’environ 2m (jusqu’à 3m) elle comporte une « banquette de tir » permettant de surveiller la tranchée ennemie et de tirer, des créneaux, des postes aménagés de mitrailleuses et des abris. Une tranchée n’est jamais rectiligne, afin d’empêcher les tirs en enfilade et les effets de souffle. Elle est donc en zigzag, en vague, en crémaillère, en traverse, en traverse tournante...
La terre extraite au moment du terrassement de la tranchée est répartie sur le rebord avant, le parapet, et sur le rebord arrière, le parados. Le parapet est aménagé pour permettre le tir et l’observation et est souvent renforcé de sacs de sable, alors que le parados protège les soldats des éclats d’obus explosant derrière la tranchée… Les parois de murs sont eux aussi renforcées, en fonction de la nature du sol, de planches de bois, de treillages de bois, voire de murs de béton, servant à les renforcer, à absorber les dilatations dues aux intempéries ou aux vibrations des bombardements… Au fond de la tranchée, le sol est rehaussé d’un caillebotis, plancher sommaire en bois, afin de protéger les hommes contre le fléau des tranchées, la boue… de même, postes et banquettes de tir sont aménagées de planches de bois. A espaces réguliers sont aménagés des abris légers d’une capacité de 6 à 8 hommes, à plusieurs mètres sous terre, renforcés de rondins et de poutres et capable de résister à l’artillerie légère des tranchées (jusqu’au 105mm). Au devant de la tranchée, engagés dans le no man’s land jusqu’à 30m de distance et reliés à la première ligne par d’étroits boyaux, sont aménagés des postes d’observation et d’écoute, tenus par deux ou trois hommes qui observent attentivement l’ennemi.
Immédiatement devant la tranchée est aménagé un très dense réseau de barbelés plus ou moins dense, souvent accompagné de piquets et de chausse-trappes (pièges de pointes métalliques) destinés à freiner la progression ennemie et d’empêtrer l’adversaire dans un réseau mortel…
Le barbelé est le moyen de défense le plus rapide, le plus facile à mettre en place sur une grande étendue et le moins cher. Facile à produire, léger, peu encombrant (Stocké en rouleaux), relativement facile à acheminer jusqu'aux tranchées de première ligne, il peut être installé par peu d'hommes et es difficile à détruire par les bombardements.
LA TRANCHEE DE COMMUNICATION OU BOYAU
La tranchée de communication est communément appelée boyau ou sape : le boyau relie la tranchée de première ligne aux tranchées de l’arrière. Il est le plus souvent tracé en zigzag, en vague ou en crémaillère, profond de 1m50 à 2m et assez étroit afin de protéger les hommes qui y circulent. Il est aménagé à intervalles réguliers afin de permettre le croisement des hommes, le passage de brancards, du ravitaillement ou de matériel encombrant ou encore le croisement de ceux qui « montent » et de ceux qui vont à l’arrière...
TRANCHEES D'APPUI OU DE SECONDE ET TROISIEME LIGNE
A une distance variable en fonction du terrain (entre 30 et 100m) se trouve la tranchée de seconde ligne, généralement parallèle à celle de première ligne, et reliée à elle par les boyaux. Elle sert de tranchée d'appui à la première ligne, de point de repli si la première ligne est prise par l’ennemi, de lieu de rassemblement lors d'une offensive, de lieu de repos, de poste de commandement et de poste de secours. De mêmes dimensions que la tranchée de première ligne, elle est dépourvue des aménagements de combats mais comporte de volumineux abris à 2 sorties, très souvent bétonnés et aménagés à au moins 6 mètres sous terre et capables de résister aux obus de gros calibres tels que les 380 et 420mm.
Le poste de commandement est équipé de lignes téléphoniques et de pigeons voyageurs ; le poste de secours dispose d'équipements permettant les opérations d'urgences et les premiers soins avant l'évacuation des blessés vers l'arrière. Enfin, dans les tranchés de seconde ligne se trouvent les postes de tir des mortiers de tranchée.
Dans certains cas, ce dispositif de base est renforcé d'une troisième ligne qui sert de tranchée de ravitaillement avec des entrepôts de munitions, de matériels et de provisions. Elle accueille les blessés, les dirige vers les relais d'ambulances et sert aussi de lieu de repos pour les hommes.
EVOLUTION
Telle est la structure générale du système de tranchées. Naturellement, cette structure varie en fonction des situations et des zones de combat, mais aussi des armées, appelant plusieurs remarques :
• Le no man’s land, espace entre les tranchés adverses de première ligne, varie entre 90 et 200 mètres de largeur, mais peut se réduire à une vingtaine de mètres comme par exemple sur les fronts des Vosges ou sur là crête de Vimy ;
• En Italie, dans les Alpes, la guerre se livre sur les flancs très abrupts, jusqu’à parfois plus de 3 500m d’altitude, avec certaines tranchées construites dans des glaciers (Marmolada)…
• Le choix du terrain pour l’aménagement des tranchées est souvent primordial : dans les plaines du nord, les adversaire cherchent le plus souvent à s’installer en hauteur, sur des positions dominantes : très souvent d’insignifiantes collines sans nom deviennent des enjeux vitaux : ce sont les fameuses « cotes » (Côte 60 à Neuve Capelle, cote 156 au Mont Kemmel, plateau du Chemin des Dames, crêtes de la Somme…)
• Sur le front de l'Est et au Moyen-Orient (hormis aux Dardanelles), les fronts sont si étendus que la guerre de tranchée ne se développe pas du tout comme sur le front ouest.
• Les Allemands passent rapidement maîtres en matière de construction de systèmes de tranchées : ils utilisent systématiquement le béton ou le béton armé, construisent des abris ventilés et confortables à plusieurs mètres sous terre, ainsi que des points d'appuis fortifiés, créant même dans certains secteurs un second, voire un troisième réseau de tranchées, notamment sur la Somme en 1916, mettant ainsi au point le concept de défense en profondeur avec redoutes et rendant une percée décisive quasiment impossible. Les tranches allemandes du HWK sont à cet égard exemplaires.
VIE ET MORT DANS LES TRANCHEES
Généralement, le soldat passe d’un jour à une semaine en première ligne avant d’être relevé. Surtout, il ne combat pas tout le temps, loin s’en faut. Les temps de combats sont peu fréquents, hormis pour les unités d’élites. De nombreux secteurs du front sont très souvent calmes, sans grande activité guerrière, comme par exemple en plaine de Haute Alsace, alors que d’autres connaissent une intense activité de combats comme le secteur d’Ypres… Dans les secteurs peu exposés règnent le plus souvent le désœuvrement et l’ennui, mais la vigilance doit rester totale : les bombardements inattendus, les tireurs d’élite et le coups de main font chaque jour de nombreuses victimes sur tous les secteurs du front…
Dans la tranchée, une journée ordinaire est assez calme, livrée aux observateurs et aux tireurs. La nuit est en général plus animée, occupée par le déplacement des troupes et du matériel, la maintenance ou l'expansion des réseaux de barbelés et les reconnaissances des défenses ennemies…
L’enfer s’installe lorsque la tranchée est dans un secteur de combat… Il s’agit alors pour le combattant de survivre aux bombardements, aux attaques et contre-attaques répétées, à la boue, aux rats, aux poux de corps, aux mouches, aux excréments, à la proximité des cadavres ou des amis et ennemis qui agonisent parfois durant des jours à quelques mètres des tranchées, à l'air vicié des abris ou pollué par les gaz chimiques, à la fumée et aux vapeurs émises par les armes et munitions, à la faim et à la soif...
L'intensité des combats est telle que 10 % des soldats sont tués dans les tranchées, et que le niveau de pertes additionnant morts et blessés atteint 56 %... sans compter le nombre de soldats souffrant après le conflit de séquelles psychologiques et sanitaires (Trouble de stress post-traumatique, trouble comportemental de guerre, shell shock, syndromes divers…)
TEMOIGNAGES
La boue : « Ce simple mot, pluie, qui ne signifie rien pour un civil ayant un toit au-dessus de la tête, contient à lui seul toute l'horreur pour un soldat sur le champs de bataille". Nous étions remontés en ligne devant Herbécourt, dans la tranchée Clara, où tout l'héroïsme consistait de résister durant quatre jours à la succion de la boue qui faisait ventouse par en bas... Pour un sale coin c'était un sale coin, un lac de bouillasse d'où émergeaient des tas de boue qui s'arrondissaient en forme de croûtes molles et boursoufflées que crevaient les obus qui faisaient jaillir des geysers giclant épais à différentes hauteurs, le trou des entonnoirs se remplissant lentement mais inexorablement d'une eau lourde et crayeuse... » Blaise Cendrars - La main coupée - Faire un prisonnier.
« L'approfondissement progressif des tranchées a peut être permis d'éviter bien des balles dans la tête, mais il a créé la manie de s'accrocher au dispositif de défense, un besoin de sécurité auquel on eut ensuite bien du mal à renoncer. Puis les efforts requis pour maintenir ces travaux en état devenaient de plus en plus absorbants. Le pire des malheurs qui pût nous arriver, c'était le dégel soudain, qui changeaient les parois crayeuses des tranchées, fissurées par le gel, en une masse pâteuse et croulante. » (Ernst Jünger, Orages d'acier).
« Barque et Biquet sont troués au ventre, Eudore à la gorge. En les traînant et en les transportant, on les a encore abîmés. Le gros Lamuse, vide de sang, avait une figure tuméfiée et plissée dont les yeux s’enfonçaient graduellement dans leurs trous, l’un plus que l’autre. On l’a entouré d’une toile de tente qui se trempe d’une tache noirâtre à la place du cou. Il a eu l’épaule droite hachée par plusieurs balles et le bras ne tient plus que par des lanières d’étoffe de la manche et des ficelles qu’on y a mises. La première nuit qu’on l’a placé là, ce bras pendait hors du tas des morts et sa main jaune, recroquevillée sur une poignée de terre, touchait les figures des passants. On a épinglé le bras à la capote.
Un nuage de pestilence commence à se balancer sur les restes de ces créatures avec lesquelles on a si étroitement vécu, si longtemps souffert. Quand nous les voyons, nous disons : « Ils sont morts tous les quatre. » Mais ils sont trop déformés pour que nous pensions vraiment : « Ce sont eux. » Et il faut se détourner de ces monstres immobiles pour éprouver le vide qu’ils laissent entre nous et les choses communes qui sont déchirées. » (Henri Barbusse, Le Feu, Flammarion, 1916, réédition Le Livre de poche, p 250-251)
« Les morts bougeaient. Les nerfs se tendaient dans la rainure des chairs pourries et un bras se levait lentement dans l’aube. Il restait là, dressant vers le ciel sa main noire tout épanouie ; les ventres trop gonflés éclataient et l’homme se tordait dans la terre, tremblant de toutes ses ficelles relâchées. Il reprenait une parcelle de vie. Il ondulait des épaules, comme à son habitude d’avant quand sa femme le reconnaissait au milieu des autres, à sa façon de marcher. Et les rats s’en allaient de lui. Mais, ça n’était plus son esprit de vie qui faisait onduler ses épaules, seulement la mécanique de la mort, et au bout d’un peu, il retombait immobile dans la boue. Alors les rats revenaient… » (Jean Giono, Le Grand Troupeau, Gallimard, 1931, réédition Œuvres romanesques complètes, bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, tome I, 1971, p.620 à 622.)
« Sans regarder, on y sauta (dans la tranchée). En touchant du pied ce fond mou, un dégoût surhumain me rejeta en arrière, épouvanté. C'était un entassement infâme, une exhumation monstrueuse de Bavarois cireux sur d'autres déjà noirs, dont les bouches tordues exhalaient une haleine pourrie, tout un amas de chairs déchiquetées, avec des cadavres qu'on eût dit dévissés, les pieds et les genoux complètement retournés, et, pour les veiller tous, un seul mort resté debout, adossé à la paroi, étayé par un monstre sans tête. (...) On hésitait encore à fouler ce dallage qui s'enfonçait, puis, poussés par les autres, on avança sans regarder, pataugeant dans la Mort... » (Roland Dorgelès, Les Croix de bois, Paris, Albin Michel, 1925.)
Troupes formées d’Africains et d’Asiatiques des colonies françaises.
Durant la guerre la France recrute dans ses possessions africaines et asiatiques nombre de soldats et de travailleurs : 270 000 tirailleurs maghrébins, 170 000 tirailleurs dits « sénégalais » et 30 000 tirailleurs indochinois. 72 000 d’entre eux tombent sur les divers fronts. Ces levées de troupes provoquent des révoltes (Constantinois, Burkina-Faso).
Ni la Belgique et ni l’Angleterre n’utiliseront de troupes africaines en Europe.