Par Mireille Biret
Publié le 1er octobre 2010
La population alsacienne est mise sous contrôle, au travers d'organisations touchant tous les aspects de la vie. Elle doit participer à l’effort de guerre.
Retour à Alsace 1940-1944
Propagande de la NS-Volkswohlfahrt
Affiche anonyme, v. 1942
Photo et coll. BNU Strasbourg (ref. 738517)
Le parti tient la population sous contrôle grâce aux multiples organisations. La plus importantes fut sans doute le Front du Travail (Deutsche Arbeitsfront, DAF), qui rassemblait patrons et salariés
Cette organisation est introduite dès septembre 1940 et son appartenance devient obligatoire pour tous les salariés le 1er juillet 1942.
La ligue nationale-socialiste d’entraide populaire (NS-Volkswohlfahrt, NSV) est, quant à elle, chargée des œuvres sociales. Elle intègre également les actions du secours d’hiver (Winterhilfswerk, WHW). L'affiche de propagande ci-contre proclame : Sers ton peuple, entre comme infirmière au service du NSV (Diene deinem Volk, Komm als Schwester in die NSV Arbeit).
La NS – Frauenschaft, enfin, est une organisation féminine de masse. Elle participe, dès 1943, à l’effort de guerre en servant notamment dans les hôpitaux militaires ou au NSV où les femmes sont employées aux tâches d’entraide.
Collectes pour le front
Ill. Albrecht, 1941
Photo et coll. BNU Strasbourg (ref. 738616)
La population alsacienne est tenue de participer activement à l’effort de guerre : le rationnement est introduit dès juillet 1940, les quêtes et les collectes se multiplient, une lutte est engagée contre le gaspillage et le marché noir est réprimé.
Tous les biens de consommation deviennent l’objet de restrictions, de contrôle et de collectes.
L'affiche ci-contre interpèle en disant : Le soldat du front voit ton sacrifice (Der Frontsoldat sieht auf dein Opfer). La population alsacienne est en effet sollicitée de manière répétitive à la fois par des actions de ramassage de toute sorte et par de nombreuses quêtes au profit des organisations d’assistance. Le lien affectif entre l’arrière et le front est mis en avant.
Collectes d'articles d'hiver
Affiche anonyme, v. 1942
Photo et coll. BNU Strasbourg (ref. 738706)
Au fur et à mesure que la guerre se prolonge, les collectes les plus diverses sont organisées.
L'affiche ci-contre proclame : Camarade, nos soldats ont besoin de tes skis et chaussures de ski pour les combats d’hiver (Volksgenosse unsere soldaten brauchen deine Bretter und Skistiefel fuer den Winterkampf). L’hiver 1941-1942, qui a surpris la Wehrmacht sur le front de l’est, est en effet l’occasion d’une grande campagne de ramassage de skis et de lainages.
À partir de 1942 sont mis en place les Opfersonntage (les dimanches du sacrifice) durant lesquels se déroulent des quêtes dans la rue ou à domicile avec l’obligation d’émargement.
Ces quêtes sont aussi un moyen de tester la ferveur politique des Alsaciens.
Le rationnement est introduit dès juillet 1940. Le ravitaillement est aligné sur celui du Reich et se situe à un niveau plus élevé que celui subi par le reste de la population française, ce que ne manque pas de rappeler la propagande.
Cependant, au fur et à mesure que la guerre se prolonge, l’usage d’ersatz est de plus en plus massif.
En parallèle se développe le marché noir. Les trafiquants sont considérés comme des ennemis du peuple et sont, en tant que tels, sévèrement punis. Pour lutter contre lui, tout devient objet de contrôle (les animaux sont recensés, le nombre d’œufs à produire est fixé…).
L’ordonnance criminelle du 15 novembre 1942 met fin à une période de transition en Alsace, pendant laquelle des délits mineurs étaient pardonnés en tenant compte de l’habitude de l’époque française de prendre à la légère les sanctions prévues en cas de non-respect des lois.
La direction nationale-socialiste a décidé entre temps et fait connaître clairement à la population alsacienne que le temps d’une indulgence déplacée est révolu. Désormais, le coupable doit s’attendre à être puni selon toute la rigueur de la loi…
Un boulanger de Molsheim était réputé pour le fait qu’on pouvait acheter chez lui du pain sans tickets ; des personnes venaient même d’autres localités dans ce but, notamment de la haute vallée de la Bruche. Il vendait ce pain sans ticket, mais en exigeant 20 à 26 Pfennig pour la livre de pain au lieu du prix réglementaire de 17 Pfennig. Il disposait de stocks anciens de farine dont il avait omis de faire la déclaration légale. Avec sa complicité, sa fille faisait en outre de fausses déclarations au Service de Rationnement, dans le but d’obtenir de plus grandes quantités de farine.
Le caractère particulièrement condamnable d’une telle attitude prend sa source dans l’intérêt personnel, contraire aux dispositions de l’économie de guerre.
Le boulanger a été condamné à 14 mois de mois de prison, sa fille à 8 mois.
SNN, 2 décembre 1942
Tout est soumis à économies. Les repas doivent devenir spartiates. L’Eintopfgericht, un plat unique, est présenté comme une offrande dédiée au Reich. À partir de janvier 1941, il est obligatoire deux fois par semaine, le lundi et le jeudi.
Ce plat est comparable aux repas servis aux soldats du front. Les sommes épargnées sont officiellement destinées aux quêteurs du WHW.
Haguenau a organisé avec succès le premier repas à plat unique en Alsace : appétissante soupe aux lentilles préparée dans les cuisines roulantes de l’armée dans une ambiance joyeuse, le repas pour 50Pf.
La manifestation fut ouverte par le Camarade Kalmbacher, chef de la propagande par un discours exprimant l’importance sociale de la manifestation et remerciant les femmes de la NS Frauenschaft et les filles de la BDM pour le service. 1 200 convives participèrent au repas…
SNN, 12 novembre 1940
Strom und Kohle
Affiche anonyme, v. 1942
Photo et coll. BNU Strasbourg (ref. 738958)
Strassburger Verkehrsbetriebe AG. Arbeitskamerad am Fahrschalter, Strom und Kohle sparen : les autorités insistent surtout sur les économies à réaliser dans le domaine de l’énergie.
Le charbon doit être réservé en priorité aux industries d’armement.
Des appels répétés visent à faire baisser la consommation de gaz et d’électricité.
Avec le durcissement de la guerre totale en 1943, il est procédé à des fermetures d’entreprises et de commerces (Stillegung Aktion), afin d'économiser l’énergie et dégager de la main d’œuvre.