Par Nicolas Schreck
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L’Alsace est incorporée au sein au sein du Gau de Bade, appelé Rhin supérieur, dirigé par l’ancien instituteur Robert Wagner.
Les actes qui matérialisent l’incorporation de fait de l’Alsace à l’Allemagne nazie sont multiples :
Cette politique d’annexion de fait est en contradiction totale avec les engagements pris. Le général Huntzinger adressa en date du 3 septembre 1940, une protestation à la Commission allemande de l’armistice, constatant :
5. L’Alsace et la Lorraine ont été intégrées dans l’administration de l’Allemagne. La frontière et la police douanière ont été portées à la limite occidentale de ces territoires.
6. Les chemins de fer ont été incorporés dans le réseau allemand.
7. L’administration des PTT a été prise en main par les postes allemandes qui substituent graduellement au personnel en place leur propre personnel.
8. La langue française a été éliminée tant de la vie administrative que de l’usage public.
9. Les noms des localités sont germanisés.
10. La législation raciale de l’Allemagne est introduire dans le pays et, à la faveur de cette mesure, les israélites sont expulsés ainsi que ceux des nationaux que l’autorité allemande tient pour les intrus.
11. Seuls les Alsaciens et les Lorrains qui consentent à se reconnaître comme étant de souche allemande sont admis à réintégrer leur foyer.
[…] Rien n’illustre mieux l’esprit qui anime ces mesures en elles-mêmes arbitraires, que les paroles prononcées publiquement le 16 juillet 1940, à Strasbourg, par M. R. Wagner. Faisant état de l’élimination en cours de tous les éléments de souche ou de nationalités étrangères, ce haut fonctionnaire affirmait que le dessein de l’Allemagne était de régler une fois pour toutes la question d’Alsace.
Note pour Mr le Président de la commission allemande d’armistice Général de l’Infanterie von Stulpnagel, 3 septembre 1940. Archives Etat-Major n°3355/E.M. Wiesbaden. Cité dans SCHILB Marie. L’école alsacienne sous la domination allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Mémoire de master II. Strasbourg : Unistra (IUFM), 2011, p. 52-53.
Le 25 septembre 1940, Hitler déclara que les autorités militaires devront traiter l’Alsace et la Lorraine non pas comme des territoires occupés mais comme une portion de la patrie elle-même. Disparaissait donc la singularité héritée et commençait une mise au pas.
Cette mise au pas d’abord s’inscrit dans un contexte revendiqué d’une Allemagne nazie qui entend éviter les erreurs commises ici par l’Allemagne après 1870 (voir source).
L’adhésion des enseignants au sein du Reichsbund des Deutschen Beamten (Association des fonctionnaires du Reich) ne fait aucun doute quant à la nazification du système scolaire. Le serment prêté par les enseignants est d’ailleurs sans ambiguïté…
Il nous avertit qu’il ne suffit pas à un professeur alsacien d’être loyal envers l’Allemagne, il faut avant tout être national-socialiste pour élever la future génération. Il faut surtout en dehors du service mettre toutes ses forces à la disposition du parti et de sa propagande.
Puis, il nous explique les feuille que nous devons remplir jusqu’à jeudi prochain, c’est sous la foi du serment que nous les remplirons. Il insiste : signez, si le sang alémanique est encore assez puissant en vous et si vous croyez pouvoir bien servir le national-socialisme. Sinon….
Sinon, il oublie de nous dire ce qui arrivera : nous serons expulsés de notre pays avec trente livres de bagages et 4000 francs. Le reste de notre fortune sera confisqué au bénéfice des vainqueurs ! Combien parmi nous signeront ? On verra.
BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 37. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.
Exemple n°1 :
Le Führer, après une lutte gigantesque, a réparé le crime du Diktat de honte de Versailles et a regagné l’Alsace allemande pour le Reich grand allemand.
Je suis d’accord pour le retour de mon pays au sein du Reich et je remplirai les obligations qui m’incombent en ma qualité d’éducateur et de fonctionnaire allemand, sans réserve et avec joie.
Exemple n°2 :
Je sais qu’en ma qualité de fonctionnaire et d’éducateur allemand, je dois faire mon devoir partout au Reich, là où la nécessité de l’Etat l’exige et comme il est conforme aux principes du national-socialisme. Je remplirai donc sans aucune réserve et à n’importe quel endroit les devoirs qui me sont déférés.
Exemple n°3 :
Je suis prêt à me mettre au service actif du Führer et de la Grande Allemagne nationale-socialiste, et cela dans ma profession et en dehors de ma profession.
BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 35. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.
Les enseignants et les professeurs adhérent également au NS Lehrerbund (Association du corps enseignant). Cette attitude vise à utiliser les enseignants comme des auxiliaires de la germanisation de l’Alsace.
La nazification imposait également un stage en Allemagne (Umschulung). Ce stage se déroulait généralement en deux moments, imposant un séjour en Allemagne. Y étaient développées les formes de pédagogie du national-socialisme, mais également l’adhésion à des valeurs communes, faites de camaraderies et d’engagements politiques.
Au retour de ces stages, les maîtres adhéraient au NS Lehrerbund.
Un certain nombre d’enseignants sont expulsés, en particulier les Juifs et les Francs-maçons. Un certain nombre d’enseignants allemands sont affectés spécifiquement en Alsace.
J’ai rencontré un ancien élève qui a été envoyé dans la Gauschule établie dans l’ancienne fabrique Kiener à Walbach-Hammerschmiede. Là, les nazis ont réuni des jeunes Alsaciens pour les initier au national-socialisme. Il m’a tracé le programme d’une journée. Lever à 6 heures. À 6 heures et demie, le drapeau hitlérien est hissé avec des cris de Sieh heil !, puis leur chef lit une pensée du Führer qu’ils doivent méditer pendant toute la journée. Cette cérémonie est suivie d’une demi-heure de gymnastique. À 8 heures, petit déjeuner. De 9 heures à midi, des cours sur le parti, son histoire, sa doctrine. Leurs chefs allemands leur ont déclaré que, d’après la source officielle, l’Alsace-Lorraine seule ne suffira pas à leur Lebensraum, leur espace vital, mais qu’il annexera aussi la Bourgogne, la Lorraine française avec Metz, Toul et Verdun, les trois évêchés arrachés au Reich par le traité de Westphalie, enfin Nancy et le bassin de Briey. L’après-midi est consacré aux cours, aux chants et aux promenades. Après le souper, encore des chants en commun, appelés Kameradschaftssingen, jusqu’à 11 heures. Le nourriture est bonne.
J’ai également appris que tous les fonctionnaires de n’importe qu’elle catégorie et de n’importe quel âge, et aussi les médecins doivent passer par ces Gauschulen, destinés à gagner à Hitler et à sa doctrine le plus grand nombre possible d’Alsaciens. Les professeurs et les instituteurs seront réunis dans trois camps, au Markstein dans les Vosges, à Freuenstadt et près de Constance, au pays de Bade. Tous devraient y avoir passé jusqu’au 31 mars 1941.
BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 48. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.
Après l’armistice de juin 1940, je fus appelé en octobre à un stage d’adaptation à l’école allemande (Umschulung) pour trois mois à Frisbourg en Brisgau…
Après un bref séjour à Zell-im-Wiesenthal, je fus muté à Wyhlen près de Bâle…
J’arrivais à Erfeld, à trente kilomètres du Main, à 408 kilomètres de chez moi, le 2 juin 1943. Dans ce village de 450 habitants, l’école comptait deux classes, mais les instituteurs étaient au front. J’héritais de 92 élèves, en classes mixtes…
Dans une poésie de Ludwig Uhland, on décrit le pays, le Bauland viel Steine gab’s und wenig Brot (Beaucoup de pierre et peu de pain), mais les gens n’y meurent pas de faim. La légende exagère un peu. Toute la vallée est très catholique, sauf un bourg protestant. À midi quand sonnait l’Angélus, les femmes mettaient un genou à terre, en pleine rue, pour prier. Les hommes s’arrêtaient la casquette à la main.
On pratiquait la dîme en faveur des notables puis des autres. Ainsi quand on tuait le cochon, au noir, on était généreux, mais on ne donnait pas la dixième partie de la récolte, ni de l’abattage, ni des pommes de terre…
J’achetais les œufs au prix du jour, dix-sept à vingt-et-un pfennigs. En Alsace, mon épouse, payait un mark l’œuf.
Mes élèves, petits campagnards, disciplinés et obéissants m’apportaient de la ferraille et des feuilles de tisanes pour les soldats. Ils pensaient me faire plaisir… !
Ainsi l’école comptabilisa sept tonnes de fer et une cinquantaine de sacs de feuilles séchées. Cela me valut les félicitations en haut-lieu. J’en étais malade de honte. Mais qu’y faire ?
Les collègues n’étaient pas très zélés. Ils avaient compris que les chants patriotiques et le nombre de bateaux coulés importaient plus que le travail scolaire. Le maire me reprocha un jour de tuer les écoliers à la tâche ! Mais nous nous comprenions. Car c’était un brave homme...
Je prenais pension à l’auberge où je logeais. Heureusement, j’avais un congé d’un jour par mois pour renter.
Je faisais classe de sept heures à midi. L’après-midi m’appartenait.
Au cours d’un stage, les instructeurs allemands ont prétendu nous montrer comment on prépare une leçon d’histoire. Je leur fis remarquer qu’il en était ainsi depuis des lustres chez nous.
Durant un stage de modèles réduits, mes compatriotes me mirent au défi de parler alsacien à l’inspecteur :
- Na, wie geht’s Herr Lamblat ? (Eh bien, comment allez-vous, M. Lamblat ?)
– D’heim, war’s besser ! (À la maison se serait mieux !)
J’avais gagné un déjeuner et l’inspecteur sourit. On risquait moins en parlant alsacien qu’en parlant français. Le pauvre Paul Bruxer avait parlé français dans le train, il fut jeté en prison pour huit jours.
Cité dans SCHILB Marie. L’école alsacienne sous la domination allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Mémoire de master II. Strasbourg : Unistra (IUFM), 2011, p. 55-56.
Ainsi, le témoignage montre bien l’ampleur d’une part d’une opposition au nazisme, liée à la ferveur religieuse, mais aussi la distance entre les attentes des nazis et la réalité de la classe, le maître conservant une certaine liberté pédagogique, les tâches scolaires n’étant contrôlées qu’en fonction de l’effort de guerre…
Dès le 15 septembre 1940, les Sœurs se voient interdire d’enseigner. La Congrégation n’est pas dissoute, mais les Sœurs sont licenciées. Certaines choisissent de servir dans les hôpitaux, d’autres choisissent de suivre les populations évacuées.
En 1941, les Sœurs acquièrent le château de Cayla, dans le Tarn.
Une administration allemande est mise en place, via en particulier l’inspecteur de l’enseignement primaire, le Schulrat. Au-dessus des Inspecteurs, on trouvait un Ministerialdirektor, directeur de l’enseignement primaire, Karl Gaertner, un ancien instituteur allemand.
La rentrée des classes, ajournée par manque de charbon, est effectuée au cours du mois d’octobre 1940.
Cette transformation prend diverses formes :
En automne 1940, sous l’occupation allemande, l’école des filles avait été fermée, pour abriter les soldats allemands en transit.
Le jour de la rentrée dans la Volksschule, toute consonance française était proscrite. Nous avions dû changer nos prénoms Roger est devenu Rüdiger…
Le plus dur avait été d’apprendre à lire et à écrire l’alphabet allemand. Les garçons n’avaient plus le droit de porter le béret. Les filles avaient rejoint les garçons pour former les premières classes mixtes.
Au début des cours, nous nous levions pour saluer par un Heil Hitler, Fraülein ou Herr Lehrer. Le personnel était très sévère, l’ordre et la discipline régnaient dans toutes les classes. Etre puni équivalait à recevoir dix coups de bâton sur le dos de la main, et dix autres sur les paumes autant dire que nous évitions le plus possible la punition.
Les enseignants se donnaient beaucoup de peine pour nous apprendre rapidement à parler et à écrire correctement et le plus vite possible un allemand parfait.
Deux après-midis par semaine étaient réservés pour le sport et les travaux manuels, pour les filles la broderie, du tricot et du crochet, pour les garçons, des figurines en bois.
Deux fois par semaine, monsieur le curé venait pour nous faire la religion. C’était tout juste pour nous apprendre les prières, les chants, le catéchisme et l’histoire sainte en allemand. Nous le saluions par un Gelobt sei Jesus Christus, même dans la rue quand nous passions à côté de lui.
À partir du mois d’avril, les matinées étaient consacrées aux études. L’après-midi, nous allions en forêt, pour cueillir des feuilles de mûriers, de framboisiers et de muguet, que nous entassions dans des sacs de pommes de terre. Les feuilles devaient servir soit disant à faire des tisanes pour les troupes allemandes.
Mais la besogne la plus dégoutante était le ramassage des doryphores dans les champs de pommes de terre. D’après les enseignants, il paraît que c’est l’aviation anglaise qui a parachuté ces sales bestioles. Pour pouvoir manger à sa faim, malgré les rigueurs du rationnement, tout le monde plantait des pommes de terre et les doryphores proliféraient. Nous étions chargées d’en débarrasser méticuleusement chaque plant, rangée par rangée. Nous mettions les doryphores dans des boîtes spéciales destinées à être brûlées. De plus, nous devions faire très attention de ne pas piétiner les plants.
L’année scolaire, sous l’occupation, se terminait toujours par une grande fête das Erntefest, la fête de la moisson. Chaque élève apportait un fruit, un légume, des baies sauvages, des grains de seigle, de blé, d’avoine, des graines de tournesols, que nous allions ramasser dans les champs et des petites bottes de foin, que nous faisions nous même. C’est mon meilleur souvenir de ces quatre années scolaires allemandes.
À partir de 1944, les cours étaient souvent interrompus par le hurlement des sirènes. Chaque élève devait alors courir vers l’abri le plus proche de son domicile, les enseignants préféraient nous disperser, plutôt que de nous regrouper ensemble dans l’abri sous l’école.
Je me rappellerais toujours l’après-midi du 6 juin 1944. À trois heures, le Hauptlehrer est entré dans la classe comme fou de rage : Fraulein Schlusser, Sie haben gelandet, die verdammten Franzosen, mit uns ist es aus - Ces maudits français ont débarqué, nous sommes perdus-, puis il nous a renvoyés à la maison pour le restant de la journée. C’est à partir de ce jour que les cours ont été de plus en plus perturbés. En effet, avec le survol de l’aviation alliée en direction de l’Allemagne, les alertes se multipliaient. C’était la fin de l’école allemande, pendant toute une année, nous n’avions plus cours.
Cité dans SCHILB Marie. L’école alsacienne sous la domination allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Mémoire de master II. Strasbourg : Unistra (IUFM), 2011, p. 57-59.
Un monsieur assez grand prit la parole, on apprit ensuite qu’il s’agissait de notre nouveau directeur d’école. Il parlait une langue qu’on ne comprenait pas trop mis à part quelques mots se rattachant à l’alsacien. Le discours de ce monsieur fini, il y eu une levée de couleurs. Je regardais mes camarades, tous avaient l’air de ne pas comprendre ce qui se passait. Nous rentrâmes ensuite dans notre salle de classe. Elle était quasiment vide, il n’y avait plus aucune affiche sur les murs, la bibliothèque avait également changé de place et de composition. Je regardais Joséphine, ma voisine qui commençait à pleurer. Elle avait réalisé une affiche avec l’aide de sa grand-mère juste avant sa mort, c’était le dernier souvenir qu’elle avait d’elle. Joséphine prit la parole en français et demanda à Herr Arui, l’instituteur, si elle pouvait récupérer cette affiche. Ce dernier se fâcha tout de suite et cria quelque chose en allemand. Joséphine fut apeurée. On comprit dès lors que l’école était devenue allemande et qu’il ne fallait surtout plus parler français.
Cité dans SCHILB Marie. L’école alsacienne sous la domination allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Mémoire de master II. Strasbourg : Unistra (IUFM), 2011, p. 36.
Cette réouverture est accompagnée d’une fermeture des écoles maternelles, d’une fermeture des écoles confessionnelles.
L’idéologie nazie entendait façonner la jeunesse. Cette mise au service de l’idéologie devait garantir l’augmentation des effectifs des organisations de la jeunesse allemande, mais aussi lutter contre les autres formes d’associations, en particulier confessionnelles.
La formation des maîtres visait deux domaines : l’acquisition de compétences en didactique et en pédagogie, ainsi qu’un endoctrinement politique. L’apprentissage du métier restait dès lors assez classique, reposant sur l’alternance professionnelle avec des stages, la vie en internat, les jeunes enseignants maîtrisant les auteurs allemands du moyen âge ou de l’époque moderne. D’autres disciplines étaient quant à elles mises au service de la transformation de cette élite de la jeunesse alsacienne en une jeunesse allemande : l’histoire servait des objectifs politiques, dans la conformité d’ailleurs des attentes de l’Institut du Reich pour l’histoire de la nouvelle Allemagne. En Alsace, cette histoire visait surtout à dénoncer l’Alsace française et elle rappelait l’Alsace éternellement allemande, opposait périodes après périodes les deux mondes et affirmait la victoire définitive de l’Allemagne. Les élèves subissaient aussi la propagande nazie au cours de manifestations, de moments de mobilisation pour la production ou lors de l’écoute de la radio…. Elles devaient mettre en œuvre l’idéologie en secondant les efforts du parti auprès de la jeunesse.
L’encadrement était constitué de fonctionnaires allemands, secondés par des élèves allemandes en formation.
Les témoignages proposent en fait de retenir de cette période un certain nombre d’acquis, dans les modes pédagogiques mais également de mentionner que l’endoctrinement subi alors vit son influence être grandement contournée, par le maintien de la tradition, des solidarités, de la morale.
Le 22 mars 1941, les écoles alsaciennes fonctionnaient comme des écoles allemandes.
L'embrigadement se fait au bénéfice d’organisations nazies. Le service dans la HitlerJugend devient obligatoire en janvier 1942.
Doc. 8. L'embrigadement des jeunes
Photo Archives municipales de Mulhouse,
Coll. Archives municipales de Mulhouse
Un peu plus de vingt ans après qu’elle fut de nouveau ravie à la culture allemande par le diktat de Versailles, cette vieille terre allemande est maintenant pour toujours incorporée dans le Reich Grand-Allemand, grâce à l’exploit historique du Führer et grâce à la victoire des armées allemandes. Elle est redevenue ce qu’un pays frontière devra être : digue et marche du Reich ! La légende du pont entre l’Allemagne et la France, la légende de la double culture du peuple alsacien et lorrain est terminée.
MEISSNER Otto. Elsass und Lothringen, Deutsches Land. Berlin, 1941, p. 9.
(Droits réservés).
Fils d’un fonctionnaire des postes volontaire pour s’installer en Alsace, ce juriste marié à la une Allemande servit au sein de l’armée de Prusse au cours de la première guerre mondiale, avant de refuser un poste à la direction des chemins de fer d’Alsace-Lorraine au profit d’un poste au cabinet de Friedrich Ebert, à Berlin, avant de remplir les fonctions de secrétaire particulier d’Hindenburg et de Von Papen. Ministre d’État, il fut acquitté lors du procès de 1949.
L’allemand devient la langue de l’administration (16 août 1940), les noms et prénoms sont germanisés (23 novembre 1940), les traces d’une double culture sont détruites, en particulier les statues des généraux Kléber, Kellermann, Rapp, Bruat…
Cette politique est en fait un double échec :
Les mises en garde contre l’utilisation du français s’étaient en effet multipliées. Le problème devait au départ être réglé, selon Wagner, en un trimestre, par un retour à la langue maternelle. Pourtant, nous trouvons un nouvel avertissement, en avril 1941, dans le Sr NN :
Quoique le peuple alsacien dans son ensemble ait, depuis sa délivrance par l’Armée allemande, prouvé dans de nombreuses manifestations qu’il se détachait de tout souvenir français, certains éléments irresponsables ne peuvent encore s’empêcher de répudier leur langue maternelle et de parler français.
Dorénavant, des mesures sévères seront prises contre de pareils éléments
Cité dans TOUITOU Delphine. Les mutations de la vie quotidienne des élèves alsaciens de 1940 à 1945. Mémoire de maîtrise. Strasbourg : Université Marc Bloch, 1996, p. 20.
De nouveaux avertissements allaient régulièrement confirmer le maintien du français en Alsace.
Le bilan quant à l’adhésion des élèves à la politique de nazification est bien plus ambigu à saisir :
Par ordonnance du 15 septembre 1944, le ministre de l’éducation nationale rétablit le régime scolaire d’avant juin 1940. Le programme rétabli est celui de la France de 1923. Ce temps impliquait de nouvelles ruptures avec cette fois le refus de l’allemand.