- CRDP d'Alsace - Banque Numérique du Patrimoine Alsacien -

La libération
et le retour à la France

Par Nicolas Schreck

Publié le à définir

Une atmosphère de liesseRevenir au début du texte

Doc. 1. Les chants de la LibérationAlbum de photos

Ce cahier contient essentiellement des chants patriotiques : La Marseillaise évidemment, mais également Le Chant du départ, des classiques militaires comme La Madelon, d’autres plus thématiques comme Le retour ou des chants des armées coloniales (Sidi-Brahim) ou emblématiques de certains corps de l’armée comme Le Chant des Africains.

Alors que d’autres exaltent des personnages historiques, avec la figure de Jeanne d’Arc (C’est le cor de Jeanne Lorraine qui résonne et s’égrène dans la nuit sereine), d’autres chants célèbrent les nouveaux héros de la guerre, comme Leclerc et De Gaulle. Tous témoignent en fait de la fidélité de l’Alsace à la France et de son bonheur à réintégrer la Mère Patrie.

Pour les maîtres, un recyclage ; au sein des écoles, une épurationRevenir au début du texte

La situation est présentée par René Paira, nommé préfet du Haut-Rhin en juin 1945 :

Doc. 2. Distinguer parmi les Alsaciens…

Dès 1940, les Allemands avaient mis en place le réseau de leurs organisations politiques. D’une façon anodine d’abord, ce fut le Elsässerische Hilfsdienst. […] Puis, l’action dut plus directe, le contrainte s’accentua. Pour entrer dans une école secondaire, il fallait faire partie de la Jeunesse hitlérienne. […]

Comment, en face de ce régime dictatorial, retrouver ceux qui l’avaient servi volontairement et les distinguer de ceux que l’avaient subi ?

PAIRA René. « Une épuration mesurée ». In WAHL Alfred et REUMAUX Bernard (dir.). Alsace. La grande encyclopédie des années de guerre. Strasbourg : Les Saisons d’Alsace/La Nuée Bleue, 2009, p. 1613.

En effet, la nomination à un service allemand ne constitue pas en Alsace un motif à lui-seul d’indignité (Note au gouvernement du commissaire de la République, 16 septembre 1944).

L’épuration toucha environ 1 % de la population. Les condamnations à mort furent peu nombreuses, onze dans le Haut-Rhin, dont sept par contumace, une seule exécution étant réalisée, touchant Mourrer, l'ancien député, ancien Kreisleiter de Mulhouse.

Dans l’enseignement, d’importantes sanctions ont été prises contre les collaborateurs actifs, allant du blâme à la révocation : 360 dans l’enseignement, par comparaison 500 dans les mines de Potasse, 164 dans la Poste, 50 dans la police (Voir source).

L’accueil de 10 000 enfants en SuisseRevenir au début du texte

Continuant à être soumis aux risques du front, d’un séjour prolongé dans les caves et les abris, de difficultés de vie quotidienne, le maire de Mulhouse, Auguste Wicky, ainsi que son adjoint Jean Wagner, avaient obtenu des autorités suisses l’évacuation des enfants, démarche soutenue par Madame Favre-Dollfus de la Croix Rouge et les autorités militaires de la Première Armée.

Cet accueil permit à près de dix mille enfants, de 4 à 14 ans d'être accueillis en Suisse, partant en 19 convois, dès le 3 janvier 1945, vers Bâle ou Rheinfelden.

À leur accueil, après une visite médicale, les enfants étaient épouillés, désinfectés, affectés enfin à des familles.

Si le volontarisme des autorités françaises et suisse est évidence, les difficultés ont été nombreuses pour les enfants : difficulté de la langue, rupture des contacts avec la famille, exception faite d’une carte postale autorisée tous les quinze jours, mais aussi difficulté d'adaptation à la vie helvétique : si certains y apprirent le ski, d’autres finirent comme garçons-vachers.

Le retour en classe pour les anciens incorporés de l’armée allemandeRevenir au début du texte

Des classes dites de transition sont organisées pour les anciens Alsaciens incorporés des armées allemandes.

Doc. 3. Témoignage de Robert Walter, professeur à Fustel de Coulanges, Strasbourg

Très vite, je fus au courant de ce qui m’attendait : des élèves d’un nouveau genre, des [/i]revenants[/i], eux aussi, mais de l’armée allemande, groupés dans des classes inédites, les classes transitoires. […] Ils avaient de dix-sept à vingt ans, certains, les plus âgés avaient combattu sur le front russe, tous avaient été formés à la dure discipline nazie. Quant à leurs études antérieures, elles avaient été bien rudimentaires. La tâche qui nous était confiée, à nous professeurs, était de les amener, en quelques mois pour les plus âgés, au niveau du baccalauréat, mais un baccalauréat aménagé à leur intention : on ne pouvait décemment leur demander d’acquérir, en ce bref laps de temps, les connaissances qui leur avaient été refusées pendant les cinq années de guerre.

WALTER Robert. « Les Malgré-Nous retournent à l’école ». In WAHL Alfred et REUMAUX Bernard (dir.). Alsace. La grande encyclopédie des années de guerre. Strasbourg : Les Saisons d’Alsace/La Nuée Bleue, 2009, p. 1626-1627.

Ces cours sont organisés en fonction de la circulaire du 8 mai 1945, rédigée par le recteur Prélot et tenant compte de la situation de l'Alsace.

Doc. 4. Extrait de la circulaire Prélot, du 8 mai 1945

Les jeunes Alsaciens et Lorrains, demeurés dans leur province en 1940, ou contraints d’y retourner avant la Libération, n’ont pu, pour la plupart, suivre un enseignement les préparant au baccalauréat français. Ils ont dû se plier aux exigences des programmes institués par l’autorité de fait. Certaines disciplines ont été totalement éliminées, d’autres mutilées, tandis que toute la formation scolaire était tournée vers des fins de propagande politique et d’assujettissement intellectuel. Si la connaissance même du français auquel s’est souvent maintenue de façon émouvante, nos lettres et notre histoire sont quasi ignorées. La formation scientifique est très faible, le niveau des études latins s’avère singulièrement bas. Par suite, les candidats des prochaines années ne pourraient, sans risque d’échecs répétés et décourageants, subir les épreuves du baccalauréat normal, tel qu’il existe dans les autres académies. Il convient de faciliter leur tâche et de seconder leurs efforts, entrepris depuis quelques mois, voire même quelques semaines, dans un vibrant enthousiasme, en atténuant pour eux les difficultés immédiates. On leur permettra un passage plus aisé d’un régime à l’autre, grâce à des examens appropriés et appelées pour cette raison : baccalauréat de transition.

WALTER Robert. « Les Malgré-Nous retournent à l’école ». In WAHL Alfred et REUMAUX Bernard (dir.). Alsace. La grande encyclopédie des années de guerre. Strasbourg : Les Saisons d’Alsace/La Nuée Bleue, 2009, p. 1626-1627.