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Les formes de la nazification
et les aspects de la résistance scolaire

Par Nicolas Schreck

Publié le à définir

Les étapes d’une nazification (1940-1942)Revenir au début du texte

On trouvera ci-dessous un tableau produit à la lecture du témoignage du professeur Marie-Joseph Bopp.

Dates Étapes
1940
12 juin Fermeture de toutes les classes de France (circulaire ministérielle)
14 juin Le ministère demande que les fonctionnaires restent à leur poste, en particulier en Alsace.
16 juillet Expulsion des Juifs de Colmar avec une valise et 2 000 francs par personne.
18 juillet Disparition des inscriptions françaises sur les magasins.
Sept. Début de l’Umschulung.
2 sept.
  • Stage pendant une semaine d’adaptation des instituteurs à l’orthographe et à l’écriture allemande.
  • Introduction de l’écriture Sütterlin : une heure par jour est consacrée à l’acquisition de la nouvelle écriture, dans les classes du Primaire et du Secondaire jusqu’à Pâques 1941.
  • Les membres des congrégations ne sont pas convoqués pour la formation linguistique, soumis à l’interdiction d’enseigner.
26 sept. Obligation du salut hitlérien.
1er oct. Annonce d’un enseignement uniquement effectué en allemand.
3 oct. Rentrée des classes, avec salut hitlérien, montée du drapeau… Toute leçon doit débuter et finir avec Heil Hitler !
22 oct.
  • Les professeurs sont appelés à favoriser l’adhésion systématique des élèves aux organisations nazies et à signaler les élèves qui n'ont pas encore été acquis au nazisme.
  • Dans les écoles primaires supérieures, certains élèves de Colmar établissent des listes d’élèves continuant à parler français.
24 oct. Premiers retours de détenus du camp de Schirmeck.
31 oct. Constitution d’un groupe Les amis du général de Gaulle au collège de Guebwiller.
2 nov. Premières exclusions d’élèves pour refus du salut hitlérien.
20 nov.
  • Retrait des crucifix dans les écoles confessionnelles, remplacé par le portrait d’Hitler.
  • Expulsions à Mulhouse.
17 déc. Obligation de retirer des bibliothèques privées les livres en français… Ils sont brûlés le samedi, au cours d’une fête païenne.
1941
5 mai Obligation est faite aux fonctionnaires de prouver qu’aucun de ses ancêtres jusqu’ à la 3e génération n’est de confession juive.
11 mai Premières convocations de garçons en vue d’une préparation prémilitaire.
15 mai Interdiction du port du béret… La sanction est un emprisonnement de trois mois de camp.
22 mai Invitation sur le temps scolaire des élèves par la Wehrmacht, avec participation à des exercices de démonstration.
23 mai Projection au cinéma du film Sieg im Westen.
5 sept. Obligation pour tous les enseignants d’adhérer à l’Union national-socialiste des enseignants.
19 oct. Interdiction de certaines œuvres allemandes, dont celles de Friedrich Schiller.
19 déc. Seuls les élèves membres de la HJ peuvent passer l’Abitur.
1942
26 janv. Distribution d’une carte du Grossdeutschland, avec l’Alsace annexée.
28 mai Renvoi du lycée de tous les élèves qui n’appartiennent pas à la HJ.
6 juillet Propagande en faveur de l’engagement de la jeunesse dans l’armée allemande.

D'ap. BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 48. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.

Divers actes de refusRevenir au début du texte

Doc. 1. Le refus du salut hitlérien

Ce matin en entrant en classe, mes élèves de classe de 8e n’ont pas répondu au salut hitlérien. Après le cours, un de mes élèves a été chargé de me dire qu’ils voulaient par ce refus me montrer quels étaient leurs sentiments politiques. Ils avaient choisi ce jour parce que le seul élève dont ils se méfiaient manquaient.

8 octobre 1940.
BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 54. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.

Doc. 2. Attaque contre le drapeau nazi

Grande émotion dans notre lycée ! Dans la nuit de samedi à dimanche, le drapeau hitlérien qui flottait dans la cour de l’établissement a été descendu et volé. À la place se trouvait une pancarte : vous avez vu ce drapeau pour la dernière fois. Le mât peut encore servir pour pendre Hitler. Vive la France ! Une enquête est ouverte.

18 novembre 1940.
BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 65. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.

Doc. 3. Le maintien de la langue, extrait du journal Kurier

Dernier avertissement : quoique le peuple alsacien presque tout entier depuis sa libération par l’armée allemande se soit libéré dans de nombreuses manifestations de tout souvenir de la France, il y a cependant quelques éléments isolés et sans scrupules qui continuent toujours encore à renier leur langue maternelle et qui continuent à parler français.

Cette note sert d’avertissement qu’on sévira désormais contre ces éléments sans aucun égard. Qui donc à l’avenir, par l’usage provoquant de la langue française dans le public, pèche contre le caractère uniforme et allemand du peuple alsacien, pourra s’attendre à une réponse correspondance !

25 avril 1941.
BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 102. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.

Doc. 4. Départ pour la France…

La classe de 7e a reçu l’ordre de passer quinze jours dans une école de vol à voile au lac de Constance. Au lendemain de leur arrivée, deux élèves des vingt envoyés manquent à l’appel. Ils avaient réussi à traverser le lac et de Suisse, ils se sont rendus à Lyon.

Propos rapporté par Ignace Baumgartner, professeur et ancien adjoint de Guebwiller, 17 octobre 1941.
Cité dans BOPP Marie-Joseph. Ma ville à l’heure nazie : Colmar, 1940-1945. Strasbourg : La Nuée Bleue, 2004, p. 142. Édition établie par Nicolas Stoskopf et Marie-Claire Vitoux.