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Pistes pédagogiques
Évasion et répression au RAD

Par Laure Balzano

Publié le 1er octobre 2010

Analyse d'un document d'archiveRevenir au début du texte

Auteur : Laure Balzano

Niveaux d'enseignement et de formation : Collège, lycée

Couverture spatio-temporelle : Alsace, seconde guerre mondiale

Domaines disciplinaires et transversaux : Histoire, LRA (Langues Régionales d’Alsace)

Resumé : Mme Held raconte, dans une lettre manuscrite, un épisode de sa période de travail au RAD, dans les usines Dornier à Friedrichshafen, au bord du lac de Constance. Elle s’était échappée avec des camarades du camp de Wasserbourg et a été rattrapée par la police qui ramena le groupe de six jeunes filles au camp où on leur infligea une sanction disciplinaire. Le document sur papier à en-tête de la direction RAD du secteur XII, dont une copie lui a été remise et qu’elle a conservée, est la trace administrative de cette décision.

Propositions d'utilisation : Analyser le document officiel (instance décisionnelle, tampon...) ; travailler sur le texte en langue allemande ; étudier l'incorporation de force par le témoignage

Mots-clefs : Incorporation de force / RAD / Évasion / Pressions et répression

Version imprimable : fiche_malgre-elles.pdf (format Adobe Acrobat - 104.38 ko)

Contextualisation

Mme Fuchs, qui a soigneusement conservé ce document jusqu'à aujourd'hui, l'a accompagné d'un texte qui permet de comprendre son contexte de rédaction et l'impact qu'il a eu pour elle. Nous en reproduisons ci-dessous les passages apportant des détails intéressants à ce propos.

J'ai reçu la convocation pour mon incorporaiton de force dans le RAD le 6 novembre 1943 et j'ai quitté le foyer le 10 au matin pour Geislingen/Steige (Wurtemberg) (...)
Le 7 septembre 1944 je me suis évadée du camp pour rentrer en Alsace, mais je fus arrêtée avec tout mon bagage par la police de Radolfzell, car notre fuite, nous étions six, était signalée à Constance, Fribourg, Kehl etc.
Ramenée le soir même au camp, je n'insiste pas sur notre deveine et la façon dont nous avons été reçu.
Placée sous observation une allemande espionnait mes faits et gestes et ne me quittait pas dans mes déplacements.
Le lendemain en arrivant à l'usine une SA de première heure (...) me traita de
saboteur traitre et de favoritisme pour l'ennemi.
La cheftaine de la région (Gauführerin) fut avertie et se déplaça à Wasserbourg le dimanche suivant. Elle aussi nous traitait de tous les noms et nous faisait savoir que nous serions traduites devant le tribunal (RAD), celui-ci ayant une législation spéciale.
[La cheftaine du camp s'obstinait à croire que j'étais l'instigatrice de notre fuite et m'a fait scier seule pendant quelques jours] des poutres calcinées de 40 centimètres de côté que les usines (...) avaient récupérées après le bombardement du 3 août 1944.
Le jugement de ce fameux tribunal se faisait attendre et ce n'est que le 2 novembre 1944 jour de départ des Allemands que j'eus connaissance du jugement nous condamnant à 14 jours d'arrêt.
Mais j'ai rédigé un recours en grâce immédiatemment et nous avons pu rentrer le 7 novembre 1944, alors que les troupes libératrices étaien de l'autre côté des Vosges.

Document original

Notification de sanction de service

Notification de sanction de service
Document officiel RAD, 1944
Coll. Mme Held

Transcription :

Ausfertigung

Die Führerin des Bezirks Nr. XII - Württemberg
des Arbeitsdienstes für die weibl. Jugend
Sprechzeiten : Mo., Di., Do. und Frei. 10-1/2 12 Uhr
und 14 1/2-15 1/2

Stuttgart S. den 16 Okt. 1944
Fernruf 71651 / 7 36 79
Postschekkonto Stuttgart 7621 der Arbeitsgauleitung 26

Abt. Dienststraf-u. Beschwerdeangelegenheiten
Geschäftszeichen D. u. B. Nr. X25k-249 / 44 We / No.
(Bei Beantwortung angeben)
Lossburg Krs. Freudenstadt RAD-Lager 18/121

Dienststrafbescheid

Die Kriegshilfsdiensmaid Renate Fuchs
geb. 12.3.1926 in Hohrod / Els.
z. Zt. Kriegshilfsdienstlagr Wasserburg
Wasserburg wird mit

14 Tagen Lagerarrest

bestraft, weil sie gegen Zucht und Ordnung im Reichsarbeitsdienst verstossen hat.

Gründe :

Die Beschuldigte hat am 7.9.1944 ohne Erlaubnis ihre Dienststelle verlassen, um nach Hause zu fahren.
Beweis : Geständnis der Beschuldigten.

Strafmildernd habe ich berücksichtigt, dass die Beschuldigte infolge der im Werk umgehenden Gerüchte über die Lage im Elsass in schwerer sorge um die nahe Zukunft ihrer Heimat war und deshalb das Bedurfnis hatte, nach ihren Eltern zu sehen.

Gegen dieses Dienststrafbescheid kann die Beschuldigte frühestens am nächsten, spätestens am 5. Tage (einschl. Sonn- und Feiertage) nach der Bakanntgabe dieses Bescheides mündlich oder schriftlich Dienststrafbeschwerde beim Herrn Reichsarführer, Berlin-Grunewald, Schinkelstr. l-7 einlegen.

gez. A. Hammer
Stabshauptführerin

Die Richtigkeit der
Ausfertigung begalubigt :
Lossburg 30.10.1944

Traduction :

Copie de document

La cheftaine du secteur XII –Württemberg
du Service du travail de la jeunesse féminine
Horaire de réception : lundi mardi jeudi et vendredi 10h et demie à 12 h
et 14h30 à 15h30

Stuttgart S, le 16 octobre 1944
Camp du Service national du Travail RAD 18/121
Téléphone 71651 / 7 36 79
Compte chèque postal Stuttgart 7621 de la direction provinciale du travail Arbeitsgauleitung

Bureau des affaires concernant les sanctions et réclamations ( mention dactylographiée )
Référence D. et B. Numéro X25k-249 / 44 We / No.
(à joindre à la réponse)
Lossburg arrondissement de Freudenstadt

Notification de sanction de service

La damoiselle (Maid) de service militaire auxiliaire Renate Fuchs
Née le 12.3.1926 à Hohrod / Els.
Actuellement au camp de service militaire auxiliaire de
Wasserburg Est sanctionnée de

14 jours d’arrêts de rigueur

pour avoir contrevenu au règlement de bonne conduite et d’ordre au sein du service national du travail.

Motifs :

La prévenue a quitté sans autorisation son service le 7.9.1944, pour se rendre à son domicile.
Preuve : aveu de la prévenue.

J’ai considéré comme circonstance atténuante le fait que la prévenue, sur la base de rumeurs entendues sur son lieu de travail, concernant la situation en Alsace, s’est trouvée en grande inquiétude quant au sort immédiat de sa patrie et a donc ressenti le besoin de voir comment se portaient ses parents.

La prévenue a la possibilité de faire appel de cette sanction au plus tôt le lendemain, au plus tard le 5e jour (dimanche et jours fériés inclus) après la notification de la présente décision en déposant un recours auprès de Monsieur le Chef impérial du Travail Reichsarbeitsführer, Berlin-Grunewald, Schinkelstrasse 1-7.

Timbre du Service national du Travail RAD secteur XII
Pour copie conforme
Lossburg 30.10.1944
Signature manuscrite

Signé A. Hammer
Cheftaine principale d’état-major