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Attitude, morale, comportements

Par Damaris Muhlbach

Publié le 8 juin 2012

Le contexteRevenir au début du texte

À partir de 1534, Bucer met en place des inspections de paroisses, menées à chaque fois par un pasteur et 2 Kirchenpfleger. Ils assistent à un sermon, puis un examen des jeunes et à huis clos à un examen du pasteur avec interrogation des anciens, d’abord sans lui, puis avec lui, enfin à l’interrogation des maîtres et maîtresses d’écoles. On y observe aussi bien les progrès du protestantisme que les obstacles qu’il rencontre. Le but est, surtout dans la seconde moitié du siècle de promouvoir l’uniformité de la doctrine, de l’institution, puis de la discipline ecclésiastique.

Le rapport de visite pastorale de Marbach, en 1554, présenté ci-dessous, rend compte de la situation des paroisses dans bien des domaines. Elle commence par la mention suivante :
Nobles, très Prudents et Honorables et sages dirigeants Gracieux Seigneurs.
Dans la visitation des églises rurales ordonnée de nouveau par Vos Grâces, Messieurs les inspecteurs désignés ont constaté : premièrement qu’en général la visitation terminée s’est déroulée partout avec fruit, [...]

Le tableau suivant comporte des extraits de ce texte et précise, pour chacun des thèmes traités, les situations décrites et les solutions qui sont envisagées pour y répondre.

Rapport de la visite pastorale de Marbach (8 mai - 7 juin 1554) :
Thèmes abordés Situations décrites Réponses proposées
Catéchisme Le catéchisme a été donné avec plus d’assiduité auprès de la jeunesse, dans toutes les églises de nombreux braves garçons et fillettes ont été capables de réciter les six parties de la doctrine chrétienne, et parmi eux certains mêmes d’en commenter des parties.
Chant Également le chant d’église a été assez souvent remis en bon ordre.
Vertu Et en dehors des églises à travers des entretiens particuliers avec les chargés de communautés et les prévôts, à part dans deux ou trois localités, nous avons constaté depuis la dernière visitation effectuée, en ce qui concerne la vertu chrétienne et l’honorabilité publique, une sensible amélioration.
Assistance fidèle au culte Mais par ailleurs en général de manière remarquable trois manquements nous ont été signalés, qui sont cause d’obstacles non négligeables dans l’accomplissement convenable du service divin : le premier qu’encore maintenant, le jour du saint dimanche, après toutes les sonneries de cloche le peuple vient à l’église très lentement et les pasteurs doivent quelquefois attendre un quart d’heure et plus avant de pouvoir commencer le service par la prière et le chant. Ce premier objet Messieurs les inspecteurs ont entrepris de l’améliorer de telle manière : d’abord dans les églises à la fin du prêche et après avoir entendu le cours des enfants, toute la communauté a été soumise à remontrance pour son manque d’empressement et son retard à venir à l’église, par la représentation du grand scandale causé à la fois à l’égard de Dieu et de la décence, dans les lieux où ce désordre a été constaté ; et ensuite, que Vos Grâces envoient une ordonnance écrite aux tribunaux prévôtaux et aux chargés de paroisses à l’occasion de cette même inspection dans lequel on signalerait aux chargés de paroisse d’exercer une surveillance attentive, à ce que le dimanche pendant le prêche personne ne s’en aille divaguer, ou ne se livre à quelque occupation futile qui empêcherait les gens d’entendre le prêche. Il a été également exigé que l’on se rende à l’église ensemble et sans tarder dès que les cloches ont sonné,(…)
Comportements Le deuxième que les cadeaux de baptême et les mariages qui souvent ont lieu le dimanche, on se laisse entraîner à de grands frais, si bien que certains pauvres gens dépensent tant qu’ils ne peuvent plus rembourser par après ; c’est aussi la cause que jeunes et vieux sont absents des vêpres et du catéchisme, il y a là grande insouciance, les gens boivent et sont ivres, de quoi s’ensuivent disputes, grossièretés, blasphèmes et autres scandales. Quant à l’autre manquement concernant les cadeaux de baptême, les noces le dimanche, le fait que dans la journée dans les auberges ou ailleurs on serve à manger des plats cuisinés et que les gens restent vers le soir après 9 ou 10 heures jusqu’à minuit les uns chez les autres : tout cela Messieurs les inspecteurs vous l’ont fait savoir à grand déplaisir, aussi aux prévôts et aux tribunaux de très assidument prier et avertir, de façon à ce que cet usage mauvais et tout à fait irritant soit autant que faire se peut supprimé pour le plus grand bien de toute la communauté ; (…)
Dérangements pendant le culte Troisièmement, que les prévôts des villages proches de la ville se plaignent de la grande foule de citoyens ordinaires de la ville le dimanche, dont dès tôt le matin tous les chemins sont emplis et ces gens viennent chez eux en masse, non seulement au prêche du service divin, et encore l’après-midi au cours des enfants, mais même ils dérangent leurs propres citoyens dans l’église qui désirent écouter la parole de Dieu, ils donnent toute sorte de mauvais exemples, ce par quoi le bon ordre et l’ordonnance édictés par Vos Grâces se trouvent effacés et complètement annulés. Le troisième manquement que Messieurs les inspecteurs n’ont pas su comment rectifier, dont ils se sont sentis emplis de honte, quand ils ont du entendre, que les citoyens de la ville se comportent de manière non chrétienne et causent du scandale chez vous le saint dimanche, et une gêne grave et un manque de respect au service d’église ; et nommément tous les curés et prédicateurs de notre Église adressent une doléance grave aux citoyens qui après de nombreuses appels et admonestations basés sur la parole de Dieu également aussi se sont librement autorisés et permis de désacraliser de manière si impie et honteuse le dimanche, qui est célébré à Dieu pour détourner son terrible courroux et grande disgrâce et doit être accompli comme une bonne œuvre de sainteté.(…)
Les portes de toutes les localités évangéliques ne seront plus ouvertes le dimanche, et personne, qu’il soit étranger ou habitant du lieu ne sera autorisé de sortir (excepté ceux qui doivent circuler sur les routes pour des affaires nécessaires) avant que le prêche du service dans les églises ne soit terminé.(…)

Source : VALENTIN Jean et LEBEAU Jean-Marie. L’Alsace au siècle de la Réforme (1481-1621). Textes et documents. Nancy : Presses Universitaires de Nancy, 1985. Traduction Jean-Michel Walter - CRDP d'Alsace, 2011, p. 168.

Autel de l'église St-Thomas de Strasbourg

Autel de l'église St-Thomas de Strasbourg
Photo Rh-67, 2011

Chaire de l'église St-Thomas de Strasbourg

Chaire de l'église St-Thomas de Strasbourg
Photo Damaris Muhlbach, 2011

La célébration du culteRevenir au début du texte

Dans les églises nées de la Réforme, la célébration du culte est très largement modifiée : il est célébré dans la langue du peuple, avec une place centrale donnée à la prédication et certains usages disparaissent (invocation des saints, usage du sel, des onctions..).

Les changements dans l'exercice de la piété

Dieu a aussi accordé grâce et pardon
En toute discrétion et sérénité la distinction de jours et de nourriture est abolie comme fêtes papistes
Jeûner se confesser
aller au sacrement
Oui tout service de Dieu sans fondement effacé par nous
brûler de la cire
prendre sel et eau bénite
vigiles
entendre messes et sept temps ?
anniversaires
à l’intention des âmes
pélérinages
grâce romaine et indulgence tout tombe à terre
sans émoi notable
Tout ceci aucune puissance ne l’aurait réussi à grand bruit
Un Honorable Conseil a vidé hardiment les temples et les idoles
Quantité de lampes et lumières éternelles sont éteintes
et avec la même égale douceur
tant que Dieu lui donne grâce il continuera de même et abolira toutes les idoles

CAPITON. In VALENTIN Jean et LEBEAU Jean-Marie. L’Alsace au siècle de la Réforme (1481-1621).
Textes et documents.
Nancy : Presses Universitaires de Nancy, 1985.
Source : Wass man halten/uund antwurten soll/von der spaltung zwischen Martin Luther und Andres Carolstadt. Strassburg : Wolff Köpphel. October 1524.
Traduction Jean-Michel Walter - CRDP d'Alsace, 2011, p. 136.

Si le service principal (Hochamt) a lieu le dimanche matin, il y en a d’autres dans la journée et la semaine. À ces moments là, la Cène n’est pas systématiquement célébrée, mais souvent. Quant aux chants, ils font participer l’assemblée.

Le chantRevenir au début du texte

La prédication est suivie de cantiques, traduits du psautier hébreu dans la langue courante. La voix des femmes se mêle admirablement à celle des hommes, de manière à charmer l’oreille agréablement.

Gérard Roussel à Guillaume Briçonnet, évêque de Meaux, en 1525

Chant religieux

Chant religieux
Strasbourg : Berger T, 1562
Photo et coll. BNU Strasbourg (ref. 619460)

Recueil de psaumes

Recueil de psaumes
Psalter mit alter Kirchenübung die man bei der christlichen Gemeinde zu Strassburg… , Strassburg : Wolff, [s. d.]
Coll. Médiathèque protestante - Fondation Saint-Guillaume (P-16.45b)

Que chante-t-on ?

La messe en langue vulgaire, des psaumes, des chorals, des répons et des prières.

L’originalité dans ce domaine réside dans la création du chant d’Église, le Kirchenlied, si facile à retenir que Catherine Zell écrira en 1534, dans une préface à un recueil de cantiques : ainsi l’apprenti à son travail, la servante en lavant la vaisselle, le paysan et le vigneron aux champs, la mère près de l’enfant qui pleure dans son berceau, (tous) ont besoin de tels chants de louange, d’invocation et d’édification.

Les imagesRevenir au début du texte

Si les images sont absentes des églises dans la première partie du siècle – des scènes d’iconoclasme ont lieu en 1524-1525, elles y reviennent ensuite sous forme de scènes bibliques ou de portraits des réformateurs.

Les fêtesRevenir au début du texte

En ce qui concerne les fêtes religieuses, on note aussi une évolution tout au long du siècle : jusqu’en 1537 par réaction à la multiplication des fêtes liturgiques, on tient peu compte de fêtes sauf Pâques et Pentecôte (dès 1532 d’ailleurs, le Magistrat avait décidé que Noël serait à nouveau férié).
Dès 1553, au contraire, les fêtes sont précisées dans l’agende de Marbach, puis dans l’Ordonnance ecclésiastique, qui distingue :

Enfin, la fête des récoltes, spécifiquement luthérienne, est introduite vers la fin du siècle.

La piété personnelleRevenir au début du texte

Étant donné que les protestants proclament le sacerdoce de tous les croyants et l’importance de la confession directe, puisqu’il n’y a plus de confession au prêtre, le rôle de la prière est considéré comme fondamental.

C’est pourquoi on publie de nombreux recueils de prières dans lesquels on trouve à méditer les grands thèmes de l’histoire du salut.