Le projet Aux sources du fleuve a fait progresser les enfants en musique bien sûr mais d’autres champs disciplinaires ont pu également être investis. Ainsi, la littérature a été un domaine de prédilection.
Shakespeare
John Sanders, Portrait de William Shakespeare, 1603.
Photo : Institut canadien de conservation, OttawaAu départ du projet, ils nous paraissaient impossible d’entrer dans les auteurs que Berlioz affectionnait particulièrement. Notamment William Shakespeare, nous semblait complètement inabordable pour des enfants de cycle III. Aussi, lorsque nous nous sommes volontairement lancées dans cette aventure, nous avons été particulièrement étonnées de voir combien les enfants se sont intéressés voire passionnés pour l’histoire de Roméo et Juliette.
Aussi, pendant toute une période, une lecture tous les matins et tous les après-midi de vingt minutes, nous a permis d’aborder, avec un plaisir grandissant, les écrits de cet écrivain célèbre.
Pour permettre une compréhension de qualité, certains passages ont été racontés aux élèves tandis que les parties les plus accessibles et les plus poétiques ont été lues. De même, pour rendre les enfants sensibles à l’interprétation d’un texte, une étude comparée de différentes versions d’une même histoire, leur a permis de comprendre le diversité des traductions.
Par ces lectures quotidiennes, les enfants ont cerné quelque peu Shakespeare et ont perçu le sens de la tragédie dont les ressorts sont des sentiments exacerbés tels, la haine, la vengeance et l’amour.
De plus, une lecture en vieux français d’un de ses textes nous a appris combien une langue pouvait évoluer, devenir difficilement compréhensible et s’appréhender à travers un certain contexte. C’est pourquoi la fabrication d’une frise du temps a été un outil nécessaire pour situer les événements dans l’époque de Berlioz. L’articulation entre la littérature et l’histoire a été constante pour inviter les enfants à inscrire avec discernement leur propre vie dans l’évolution d’une civilisation.
Euphonia
Les écrits de Berlioz ont également été exploités pour comprendre combien ce compositeur ne se limitait pas uniquement à la musique et qu’il était également sensible à l’écriture. Ses critiques musicales, ses poèmes, ses fictions ont fait l’objet d’étude pour cerner le personnage. Pour connaître Berlioz sous une autre facette, les dessins humoristiques dans lesquels il a été la cible, ont été examinés avec beaucoup de plaisir par les élèves.
Berlioz caricaturé en homme-orchestre par un anonyme (1850).
Photo : Bibliothèque municipale, GrenobleMême si ses écrits ne sont pas restés aussi célèbres que sa musique, il nous a semblé essentiel de montrer comment ce critique musical prenait, à ses heures, également la plume pour écrire des fictions, en particulier Euphonia, qu’il a située dans les années 2344 !
Dans cette utopie d’une ville musicale, il est amusant pour des enfants — comme pour les adultes d’ailleurs — de penser qu’un homme du passé s’est projeté à travers une histoire dans un avenir qui est encore le nôtre. Lire ses visions de l’avenir du 24ème siècle peut faire sourire simplement au vue des évolutions techniques du 20ème siècle.
Cette fiction, Euphonia, représente une partie importante de l’opéra. Aussi, cette étude nous a permis de mettre en scène, avec beaucoup de crédibilité, une agora dans laquelle les enfants criaient des propos revendicatifs et véhéments comme ceux que Berlioz avait écrits, transposés dans notre actualité.
Ce passage est en parfaite analogie avec les personnages des bureaucrates qui sont dans le scénario de l’opéra et qui représentent, pour Gérard Garcin, une satyre de la société actuelle dans laquelle la culture est pris en otage par la bureaucratie. Tout cela renvoie aux démêlés historiques que Berlioz, en son temps, avait eu avec les institutions.
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