Durant cette année scolaire 2014-2015, deux classes de 3e des collèges Jean Macé et Saint-Exupéry de Mulhouse ont utilisé la bande dessinée comme support privilégié de différents apprentissages, essentiellement en Histoire-Géographie et en Arts Plastiques, dans une moindre mesure en Français, afin d’incarner autrement les objets d’étude des différents programmes de ces matières et d’en favoriser une meilleure représentation et appropriation.
Pour favoriser l’acquisition d’apprentissages en utilisant la bande dessinée, l’équipe enseignante associée au projet (3 enseignants dans chaque établissement) a cherché à expérimenter des pratiques pédagogiques inhabituelles ou innovantes pour leurs élèves, en utilisant donc en priorité des extraits de bande dessinée. Ce travail autour d’extraits d’œuvres du 9e art a surtout eu lieu en Histoire Géographie et en Arts plastiques où de nombreuses passerelles ont pu être développées entre les deux matières, en centrant l’étude autour des notions de conflits et de violences. Un objectif sous-jacent à ce travail était de découvrir les codes de la BD et de la narration illustrée ou/et écrite et développer des compétences et des connaissances en histoire des arts, en vue de leur examen dans cet enseignement en fin d’année. Dans le domaine de la maîtrise de la langue, ce projet avait pour objectif de permettre aux élèves d’acquérir des compétences en lecture et en écriture et développer l’oralité.
Des compétences sociales et civiques ont été également visées à travers ce projet puisqu’en permettant aux élèves de travailler sur la représentation de certains événements passés à travers un média plus actuel et en prise avec leurs réalités, tout en étant plus abordable pour certains d’entre eux, on peut donner un écho à certains de ces phénomènes qui agissent toujours à l’heure actuelle (racisme, antisémitisme, violences individuelles et collectives ou d’État, …) et donner à réfléchir aux élèves sur ceux-ci. À l’échelle mulhousienne, ce projet cherchait aussi à fédérer des élèves de deux classes différentes et de différents quartiers, pour mieux se connaître et lutter contre les préjugés, tout en permettant à chaque élève de développer son estime de soi et de son travail.
Enfin, en proposant aux élèves des temps de sortie sur le terrain ou de visite d’expositions, des objectifs en termes d’ouverture culturelle étaient assignés à ce projet.
Ce travail autour de la bande dessinée a d’abord été décliné durant toute l’année scolaire, durant différentes séquences pédagogiques parfois menées de façon transversale (élaborées et menées par les différents enseignants dans leurs matières respectives ou en co-animation) ou alors à l’intérieur de chaque matière.
En Histoire-Géographie, chaque grande thématique au programme était abordée au travers d’extraits de BD, soit dans le cadre de travaux individuels ou d’activités en groupes, avec une mise en commun, ou même dans le cadre d’évaluations. Les extraits de bande dessinée travaillés en Arts Plastiques ont permis aux élèves d’identifier les types et caractéristiques de la BD, ses codes et ses techniques, pour ensuite mieux travailler à la réalisation de planches, en lien avec les travaux faits dans les autres disciplines. Par ailleurs, en Français, des travaux sur des extraits de BD et des extraits de films d’animation ont permis aux élèves de travailler sur le passage de l’image fixe à l’image animée.
Des séquences en tâches complexes nécessitant différentes compétences et connaissances ont également été menées avec les élèves, par exemple un travail de réalisation d’une lettre de poilu après le travail mené sur la Première guerre mondiale dans les différentes matières ; cette lettre de poilu a ensuite fait l’objet d’un échange entre élèves, chacun recevant la lettre d’un de ses camarades pour ensuite l’illustrer en Arts Plastiques.
Cet échange entre élèves a aussi permis un travail autour de l’évaluation, en utilisant la technique de l’évaluation en curseur. Dans un premier temps, chaque élève a pu autoévaluer sa lettre de poilu, en utilisant une grille d’analyse du travail en curseur, avant d’évaluer la production de son pair, de l’autre établissement, après l’échange de lettres.
D’autre part, ce projet a été mené en proposant aux élèves différents temps forts pour structurer l’année scolaire et travailler autrement avec eux.
Des visites de lieux de culture et de patrimoine de proximité ont été organisées durant cette année, en lien avec les thématiques étudiées en classe : une exposition de planches de BD au Musée des Beaux Arts de Mulhouse en début d’année a permis aux élèves de découvrir des œuvres de BD sur la Première guerre mondiale à différentes étapes de construction, des sorties au Vieil Armand et au camp du Struthof leur ont permis sur site de travailler et appréhender autrement des connaissances étudiées en classe.
De même, des rencontres ont été organisées dans les deux établissements scolaires, durant les 2e et 3e trimestres. Lorna Miller, auteur BD écossaise, a ainsi pu rencontrer les élèves des deux collèges et échanger avec eux en anglais, après un travail mené par les collègues de cette discipline durant leurs cours pour préparer cette rencontre. Au début du mois d’avril, les élèves des deux établissements se sont retrouvés au collège Saint-Exupéry pour une conférence de Hélène Dumas, enseignante chercheuse au CNRS dont les travaux portent sur le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994. Cette conférence a été suivie par une rencontre avec Amina Furaha, artiste peintre vivant en France et rescapée de ce génocide, avant que des élèves du collège Saint-Exupéry ne déclament « en live » leur slam réalisé durant la semaine expérimentale se déroulant alors dans cet établissement. Au début du mois de juin, les élèves des deux classes se rejoignent au collège Jean Macé pour une conférence de Tal Bruttmann, chercheur associé au Mémorial de la Shoah, pour un retour sur l’histoire de la BD et son utilisation pour témoigner de l’Histoire du XXe siècle.
Enfin, les travaux réalisés par les élèves pour produire des planches de BD sur la thématique de la Première guerre mondiale en Arts Plastiques a été valorisé en deux étapes successives.
Une exposition de ces planches de BD mais aussi de planches inédites de 4 auteurs d’un album à paraître en 2016 (Lorna Miller, venue dans les collèges à cette occasion, Jochen Gerner, Vincent Vanoli et Frédéric Verry), a été organisée dans les deux collèges aux mois de mars et avril.
Par la suite, ces travaux des élèves (près d’une centaine de planches BD, une cinquantaine pour les deux classes associées au projet, complétées par une sélection dans les autres classes de 3e des deux collèges), ont été réunis dans un ouvrage imprimé à 150 exemplaires et distribué en fin d’année à chaque élève et dans chaque établissement.
A télécharger : Travaux d’élèves bd histoire