Par Jean-Marc Siegel
Publié le 18 juin 2012
Pourquoi ces douze là ?
... Et pourquoi douze ?
Comme les étoiles sur le drapeau européen, les signes du Zodiaque, les mois de l'année, les douze tribus d'Israël, les douze dieux de l'Olympe, les douze imams du chiisme… Arrêtons là : avec ces douze figures, on peut esquisser - mais guère plus - la richesse des personnalités, des idées, des origines, des destinées…
On jalonne le spectre : des catholiques, des protestants, des conservateurs, des radicaux, des modérés, des extrémistes, clercs ou laïcs, originaires d'un côté du Rhin ou de l'autre, qu'importe, ils ont chacun à leur manière, contribué à la floraison des idées…
Autour d'eux, on trouve évidemment des amis, des correspondants, papes, rois, princes et évêques, bourgeois ou artisans. Ils participèrent tous à un mouvement irrésistible sans qu'aucun d'entre eux n'émerge finalement comme une figure hégémonique, bien que la renommée de certains soit plus établie que d'autres.
Si chacun de ces hommes développa une réflexion riche et originale, l'effet réseau, s'ajoutant à la puissance de l'imprimerie, joua à plein : chacun connaissait les autres, avait lu ou commenté ses ouvrages, développé des amitiés dont certaines se maintinrent leur vie durant.
La conjugaison de leurs pensées permit de repousser les limites de la connaissance et d'inventer, dans tous les domaines, de nombreux éléments de notre modernité.
Wimpfeling est le parfait exemple de l’humaniste mesuré, modéré, à la recherche de la concorde. Son œuvre de pédagogue fut très féconde. Fidèle au catholicisme, il exhorta Luther et Zwingli à revenir sur leurs positions, par rapport à la messe, mais sans jeter d’anathème. Il s’éleva d’ailleurs contre l’excommunication de Luther.
D'un milieu modeste, Johannes Reuchlin se distingue par une grande soif de connaissance : grammaire, philosophie et rhétorique, grec, droit… Il fréquenta les universités de Freiburg im Breisgau et d'Orléans, voyagea dans toute l’Europe centrale et en Italie.
Si les travaux de Sébastien Brant sont caractérisés par une grande diversité, de la poésie latine à des ouvrages de jurisprudence, il reste néanmoins l'homme d'une grande œuvre, la Nef des Fous (Das Narrenschiff), une illustration d'un genre satirique, alors fort populaire.
Consacré Prince des humanistes par ses pairs, Érasme fut l’âme et l'un des principaux animateurs de la République des Lettres qui se mit en place en Europe au tournant du XVIe siècle. Face à la Réforme protestante, il a veillé à garder son indépendance d'esprit malgré les critiques de l'Église souvent acerbes.
Si l'on sait peu de choses de ses origines, Matthias Ringmann est resté célèbre pour sa contribution à la fameuse Cosmographiae Introductio, un petit livre explicatif qui complète la magnifique mappemonde Universalis Cosmographia dessinée par Waldseemüller.
Martin Luther fut un moine augustin allemand, théologien, professeur d'université, reconnu comme l'un des initiateurs du protestantisme. Influencé par l'exemple des penseurs pré-réformateurs, il désirait retrouver la vérité de la Parole de Dieu, ce dont témoignent ses célèbres 95 Thèses.
Ulrich Zwingli est l'un des grands réformateurs de son temps. Son histoire personnelle exceptionnellement riche le place au confluent des bouleversements religieux, politiques et sociaux qui ont affecté le bassin rhénan au début du XVIe siècle.
Un enfant de l'humanisme qui a grandit au cœur de l'environnement très stimulant de l'École latine de Sélestat, et un humaniste dont la bibliothèque personnelle, qui nous est parvenue presque dans son intégralité, regorge de richesses.
Sebastian Münster avait l’activité débordante : professeur d’hébreu, mathématicien, astronome et cartographe, il fut surtout l'auteur de la Cosmographia Universalis, un véritable best-seller, dont les nombreuses rééditions au cours du XVIe siècle firent beaucoup pour diffuser une culture géographique commune à travers l’Europe.
Né dans les montagnes du Hartz, Müntzer développa semble-t-il très tôt une grande curiosité pour les idées radicales. Si l'extrémisme de ses idées déplut à beaucoup, il trouva un soutien auprès des paysans révoltés contre les injustices féodales dès l'année 1524.
Élève de l'école latine de Sélestat, Sapidus en devint le recteur en 1509. Il y réhaussa alors la qualité des enseignements ainsi que la réputation de l'école, qui devint un vivier de formation et d'effervescence de la pensée humaniste moderne.
Bucer joua un rôle central dans les trois Réformes (luthérienne, calviniste et anglicane) et fut également proche de Zwingli. Il est aujourd'hui considéré comme l'un des pères de l'œcuménisme.